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22 octobre 2008 3 22 /10 /octobre /2008 00:21

M'est avis, mon cher Lucien, que ces jours de plus en plus courts te tapent sur la cafetière. En tout cas, moi, ils me fatiguent bien plus que les longues journées de l'été quand on a la lumière jusque presque minuit et que le jour se lève vers les quatre heures, si pas plus tôt. Ces jours-là, je tiens éveillé comme pour rien. Je suis plein d'ardeur, toujours actif et si je fais quand même une sieste dans l'après-midi, c'est précisément en raison de cet éveil prolongé.


C'est exactement pareil pour moi, Mârco Valdo M.I., dit l'âne en s'étirant et en mettant les oreilles à l'horizontale. Tout à fait pareil pour moi; l'été aux longs jours, je gambade, je batifole, je m'active, je suis souvent en grande joie. Mais à présent, avec ces jours trop courts, j'ai du mal à finir ma journée. Et pire encore, j'ai bien du mal aussi à la commencer. Parfois, je m'endormirais sur place et à n'importe quel moment de la journée. Et dire que ce n'est que le début...


Ne dramatise pas trop vite, Lucien. Ne dramatise pas trop vite, mon ami. On finit par s'habituer. Moi, par exemple, je m'accoutume très bien d'une petite trêve de repos dans la matinée et d'une sieste dans le début de l'après-midi. En fait, je m'entraîne pour la nuit. Et de ce fait, je me sens aussi très bien d'aller coucher plus tôt et de me lever plus tard. Le sommeil est une chose bien curieuse. D'abord, comme tu le vois, il est très élastique et je dirais même, qu'il est malléable. Il s'adapte même assez volontiers à de longues périodes d'activité – ce qui pour lui consiste bien évidemment à ne rien faire d'autre que dormir. Mais d'abord, dormir est une activité essentielle. À ne pas confondre avec se reposer. Ce sont là deux choses très différentes. Elles se recoupent parfois, mais pas toujours. On peut très bien se reposer sans pour cela dormir; on peut aussi dormir, sans pour cela se reposer. Crois-moi, pour un bon sommeil, pour dormir de façon correcte, efficiente, efficace, j'irais jusqu'à dire rentable, bénéfique, quoi... il faut y mettre du talent, car dormir, à partir d'un certain niveau, c'est tout un art. Sans doute négligé de nos jours, sans doute même, quelque peu méprisé par des ignorants ou des malades, mais c'est un art et un grand art. Souviens-toi de Virgile et de son Tytire... Le sommeil, le dormir, comprends-moi, est un des plus grands biens de l'homme et pour cela, il doit être pratiqué avec art.


Attends un peu, Mârco Valdo M.I.. Laisse-moi te suivre sur tes chemins qui ne mènent pas à Rome et si je te suis bien, je crains de comprendre que tu fais l'apologie des sommes et des sommes multiples de surcroît. N'as-tu pas entendu parler de cette crise terrible qui frappe l'humanité et qui laisse pantois plus d'un gouvernement, plus d'un puissant devenu impuissant d'un jour au lendemain. N'as-tu pas entendu que l'espèce serait en danger et que pour redresser sa barre, il lui faudra redoubler d'activités... En somme, il va falloir un mettre un coup...


J'entends, comme toi, mon bon Lucien, d'ici leur chanson : Debout les gars, réveillez-vous, il va falloir en mettre un coup, debout les gars réveillez-vous on part au bout du monde... Chanson de boy-scout et autres patronages... Chanson aux relents militaires... Bref, moi, je leur réponds en être humain conscient de son humanité et de la nécessité et de l'art et du sommeil, que s'ils veulent aller au bout du monde, ben qu'ils y aillent, mais que moi, je me recouche. Comprends-moi, Lucien mon ami, je les ai vus s'agiter comme des damnés depuis que je suis né – et sans doute était-ce déjà pareil avant ma naissance. Je les ai vu creuser leur trou avec des gestes et des cris de forcenés, pousser des hans, hans, pester, hurler, courir du matin au soir, s'agiter avant même de servir, édifier ainsi une bulle tellement gigantesque qu'elle s'en est allée au loin en les laissant le cul par terre et tout endoloris. Crois-moi ou d'ailleurs, ne me crois pas, si tu le veux, ça ne changera rien à mon propos que voici : il y a des années, peut-être quinze ou vingt ans, un jeune homme de mes amis, qui avait fait le plein d'études dans les pseudo-sciences économiques, s'en fut nanti de ses diplômes et de sa déraison travailler dans une de ces grandes banques qui manipulent des sommes astronomiques. Il m'en entretint. Il fit bien, d'ailleurs, car je lui dis à ce moment déjà que tout cela ne reposait sur rien et que tout cela n'était qu'une énorme bulle qui s'en irait dans les nuages. Bref, que tout cela n'était que du vent. Un de ces vents mauvais qui nous emportera. Enfin, qui en emportera certains, ses sectateurs, ceux qui l'auront créé de leurs essoufflements.

Et alors ?, dit l'âne Lucien un peu perplexe tout en hérissant sa crinière noire comme la boue du charbonnage, que déduis-tu de cette estimable péroraison ?









Et bien, pour en revenir à leur trou, tu sais, celui qu'ils ont creusé avec tant de gesticulations, celui dont ils attendaient tant de merveilles, et bien, ce trou, ils viennent de tomber dedans. C'était assez prévisible, ils l'avaient fait si grand, leur trou, qu'il n'y avait plus assez de place pour qu'ils puissent échapper à leur destin. Oh, Lucien, je vais te faire une confidence, ils m'ont eu un temps, ils m'ont eu en partie seulement, mais ils m'ont quand même fait courir; pas loin, pas longtemps et pas autant qu'ils l'auraient voulu, mais quand même. Juste le temps que je comprenne tout, où ils m'avaient fourré, ce qu'ils voulaient me faire faire – imagine : travailler et que je trouve une échappatoire. C'est ainsi que je suis venu te rejoindre... Mais, je peux l'avouer à présent, j'ai toujours fait la sieste. À l'école déjà, les professeurs devaient me réveiller pendant la classe... Et l'hiver, nous les hommes, et je pense, vous les ânes aussi, nous sommes comme les ours et les loirs... L'hiver, nous nous confondons dans les jours et les soirs... Il nous faut hiberner; il nous faut ralentir plus encore, et plus encore, nous activer dans l'art du sommeil.


Mais finalement, Mârco Valdo M.I., dis-moi, dit l'âne un peu décontenancé, te souviens-tu du pourquoi ? Du pourquoi tu me racontes toute cette histoire à propos d'ours, de trous, de loirs, de jours, de soirs et d'art... car, je te l'avoue, moi, je suis perdu... Je ne sais vraiment plus de quoi on cause, ni d'où l'on vient, ni encore moins, où l'on va... je finirai même par demander qui je suis...


Ohlala, mon cher Lucien, tu es bien un âne de ne plus te retrouver toi-même. Je vais t'aider par une phrase, que dis-je une pensée, appelons-la une pensée, donc, une pensée de mon ami André Isaac qui disait : « Je suis moi, je viens de chez moi et je retourne chez moi ». Et pour ce qui concerne le pourquoi, il est tout simple : les jours raccourcissent, les nuits s'allongent et du coup, on a bien moins d'entrain, plus d'envie de sommeil... Je te disais très exactement, je me cite : « M'est avis, mon cher Lucien, que ces jours de plus en plus courts te tapent sur la cafetière. En tout cas, moi, ils me fatiguent bien plus que les longues journées de l'été quand on a la lumière jusque presque minuit et que le jour se lève vers les quatre heures, si pas plus tôt. Ces jours-là, je tiens éveillé comme pour rien... » J'arrête là, mais tu te retrouves maintenant dans notre conversation. Crois-moi, il faut pratiquer l'art du somme...


Ah oui, je me souviens maintenant, mon cher ami Mârco Valdo M.I., même que tu avais continué en disant : « Je suis plein d'ardeur, toujours actif et si je fais quand même une sieste dans l'après-midi, c'est précisément en raison de cet éveil prolongé. » et que je t'avais répondu : « C'est exactement pareil pour moi, Mârco Valdo M.I.. Tout à fait pareil pour moi; l'été aux longs jours, je gambade, je batifole, je m'active, je suis souvent en grande joie. Mais à présent, avec ces jours trop courts, j'ai du mal à finir ma journée. Et pire encore, j'ai bien du mal aussi à la commencer. Parfois, je m'endormirais sur place et à n'importe quel moment de la journée. Et dire que ce n'est que le début... » Oui, oui, je me souviens. Mais tout ça ne me dis pas de quoi tu vas me causer aujourd'hui., car tu n'es pas venu sans chanson ou sans histoire quand même...


Bien sûr que non, dit Mârco Valdo M.I., que pensais-tu là. Lucien, tu le sais, on est suffisamment amis pour que tu aies confiance en moi, alors...


Alors, oui, dit Lucien, c'est comme tu le dis, mais histoire ou chanson ?









Histoire et de l'Achtung Banditen ! Encore bien. La suite. La suite, c'est-à-dire la trahison de Guglielmo Blasi et ses suites.



Vers la fin avril, les GAP centraux du Parti communiste tombèrent aux mains de l'ennemi. La grande majorité d'entre nous, y compris Spartaco, fut arrêtée en raison de la trahison de Guglielmo Blasi.

D'autres – Franco Ferri, Pasquale Balsamo, Ernesto Borghesi, Marisa Musu – avaient déjà été arrêtés suite à une confrontation armée avec la police fasciste qui était intervenue pour prévenir une de leurs actions.

La chance voulut, pour eux, que leur action fut interprétée par les policiers qui les avaient arrêtés comme une tentative de vol à main armée et que le commissaire auquel avait été confiée l'enquête fut en liaison avec le front clandestin et membre actif de la Résistance.

Toutefois quand un jour plus tard, le reste des Gap fut trahi par Guglielmo Blasi, leur situation se fit extrêmement précaire et seule la force de la résistance, qui s'exerçait même à l'intérieur de la police fasciste, réussit à les sauver.

Bien différent fut le sort de Spartaco et des autres camarades qui furent capturés suite à la trahison de Guglielmo Blasi.

Celui-ci était un petit artisan qui habitait dans une ruelle de la Suburra où il avait une famille nombreuse et très pauvre; il avait l'habitude de résoudre ses problèmes personnels par le vol et l'escroquerie.

Les Gap étaient choisis avec des critères hautement sélectifs. Chacun de nous avait été évalué soigneusement tant sur le plan personnel que sur le plan familial et social. Les doutes et les incertitudes, dans ce type de lutte, prenaient souvent, dans le chef des hommes, des tournures dramatiques. J'ai déjà raconté, effectivement, au travers de quelles incertitudes et de quels doutes pesants j'avais réussi à gagner la confiance de mes dirigeants.

Cette sélection avait été exercée à l'égard de tous es membres des Gap. Pour cela, nous ne réussîmes jamais à comprendre par quelles mailles de ce filet de contrôle, Guglielmo Blasi avait réussi à passer pour s'infiltrer parmi nous.

De fait, dans les premiers mois de la lutte antifasciste, quand il travaillait encore à la zone VI, il avait donné de bonnes preuves de soi. Évidemment, cette capacité et une sorte de courage bravache qu'il montrait parfois, avaient atténué la vigilance à l'égard de certains de ses comportements douteux. Mais on ne sut seulement qu'après que Guglielmo Blasi avait écopé dans sa jeunesse d'une grave condamnation pour des faits de droit commun.

Aussi, les premiers temps de son activité dans les Gap avaient été marqués par une certaine vivacité qui l'avait valorisé auprès du commandement. De sorte que quand, plutôt précocement, il commença à donner des signes de fatigue et même de peur, ceux-ci furent attribués à un épuisement provoqué par les dures conditions dans lesquelles nous menions notre guerre, aggravées par ses conditions familiales.

En effet, il avait de nombreux enfants, dont un en bas âge, et sa situation économique était franchement désastreuse. À l'évidence, cette condition pesa de manière déterminante sur son moral et le poussa à recourir à des moyens qu'il avait déjà utilisés dans le passé. Une nuit, durant el couvre-feu, il s'apprêtait à dévaliser un commerce. Il faut arrêté et trouvé en possession d'un pistolet et de documents allemands qui par la suite, se révélèrent faux.

Nombre d'entre nous étaient porteurs de documents semblables qui devaient servir à nous tirer d'embarras face à un éventuel contrôle sommaire au cours des rafles d'hommes de la part des Allemands ou en cas de rencontre fortuite avec un poste de garde fixe ou mobile. Il était clair cependant que face à une enquête de police, ces documents se révéleraient ce qu'ils étaient : des papiers fabriqués par les faussaires de nos ateliers.

Nous sûmes immédiatement, par sa femme, que Guglielmo Blasi avait été arrêté, mais nous pensions que c'était pour des motifs politiques. Nous prenions, chaque fois, des précautions opportunes, naturelles, chaque fois que quelqu'un tombait aux mains de l'ennemi et nous déplacions nos rendez-vous à de nouveaux endroits en demandant en outre aux camarades dont il connaissait le nom ou le refuge de trouver un nouveau logement.

Guglielmo Blasi, par contre, accusé de vol avec effraction durant les heures du couvre-feu, de port d'arme abusif et de possession de documents allemands falsifiés, eut peur et s'effondra tout de suite. Il savait que les circonstances dans lesquelles il avait été arrêté impliquaient la peine de mort selon la loi martiale allemande et, d'autre part, il se sentait condamné par la Résistance qui n'aurait certainement pas levé le petit doigt pour le sauver dès qu'elle aurait connu les causes de son arrestation; elle l'aurait même durement rejeté en lui refusant toute manifestation de solidarité, même à l'intérieur de la prison.

Son infamie et sa bassesse morale n'eurent pas de limites; en effet, fans la matinée qui suivit son arrestation, il demanda et obtint une entrevue avec Caruso, ce questeur fasciste de Rome, un des plus actifs persécuteurs des partisans et responsable d'avoir fourni aux Allemands plus de 50 antifascistes italiens pour atteindre le nombre de ceux qui devaient être assassinés aux Ardeatine. C'est pour ce crime que Caruso fut fusillé après la libération de Rome.

En quelques heures, Guglielmo Blasi avait trouvé le moyen de sauver sa peau en vendant ses camarades de lutte.

Il fut conduit immédiatement devant Caruso? Il lui raconta qu'il faisait partie des Gap et, pour lui donner la preuve qu'il disait vrai, il expliqua même les préparatifs que menaient les Gap ces jours-là pour justement liquider le questeur, en lui précisant ses horaires et ses parcours, comme il nous apparaissaient à nous qui les contrôlions pour mettre au point notre action : le restaurant où il mangeait, le chemin qu'il prenait, l'escorte qui le suivait, l'adresse de son habitation qu'il tenait secrète.

Il le mit au courant de l'organisation des Gap, des modalités de leur action, des noms qu'il connaissait, des pseudonymes, des caractéristiques de chacun de nous qui pouvaient servir à la police fasciste pour nous identifier. Il raconta dans les détails comment s'étaient déroulées nos diverses actions et en particulier, celle de la via Rasella, dont la mécanique n'avait pas encore été reconstruite par l'ennemi. En fait, les Allemands et les fascistes n'avaient pas compris que la tolite avait été placée dans le chariot et ils pensaient que l'explosion était due à une bombe lancée d'une fenêtre du palazzo Tittoni ou directement par un coup de mortier tiré des jardins du Quirinale.

Enfin, il se mit à la disposition des fascistes pour les accompagner afin d'arrêter les camarades dont il connaissait l'adresse et pour circuler dans les rues de Rome afin d'identifier ceux dont il ne connaissait pas le nom ni l'adresse.

Caruso le confia à Koch, un officier italien qui avait organisé une des nombreuses bandes de police et auquel fut réservé, après la libération, le même sort qu'à Caruso : la fusillade.

Koch commandait une bande d'ex-criminels, dont certains s'étaient infiltrés dans les rangs de la Résistance, et d'ex-partisans traîtres qui se montraient les plus féroces contre nous. Guglielmo Blasi trouva sa place naturelle dans ce milieu et de la base de la bande Koch, située dans la pension Jaccarino, via Romagna, deux jours à peine après son arrestation, il fut en mesure de mener à bien sa nouvelle tâche.

Sa chute fut – contrairement à toute prévision – tellement rapide que les mesures de vigilance n'avaient pas encore été prises par tous les camarades des Gap. En particulier, Raoul Falcioni, qui était dur este un ami personnel de Guglielmo Blasi depuis de nombreuses années et qui aurait juré de son honnêteté et de sa capacité de résister aux tortures, n'avait pas encore abandonné son habitation. Approché par Guglielmo Blasi, il pensa dès lors que son ami avait réussi à tromper les policiers qui l'avaient arrêté.

Cet après-midi-là, Raoul avait un rendez-vous avec Spartaco et Cola.

En dehors de toutes les règles élémentaires de vigilance conspiratrice, aveuglé comme il l'était par sa confiance affectueuse en Guglielmo Blasi, il l'emmena directement au rendez-vous.

Guglielmo Blasi raconta alors à Spartaco et à Cola les mêmes mensonges qu'il avait déjà racontés à Raoul. Ceux-ci les acceptèrent sur le moment, en se réservant toutefois de les contrôler dès que possible.

Puis, ils donnèrent des consignes à Raoul afin qu'il se rende à la saintebarbe, via Marc'Aurelio, pour chercher le matériel explosif pour une action qui devait se faire dans le courant de la nuit. Ils saluèrent Raoul et Guglielmo Blasi et ils s'éloignèrent. Quelques dizaines de mètres plus loin, Spartaco s'entendit appeler? Il se retourna. Autour de lui et de cola étaient alignés des hommes en chemise noire avec la mitraillette à la main qui les emmenèrent à bord d'une automobile. Ils furent conduits à la via Romagna.

La trahison de Guglielmo Blasi fut dès lors évidente pour nos camarades et il fut clair que pour eux, il n'y avait plus d'issue. L'organisation et nous encore libres, nous étions désormais à la merci du traître.

Cola avait en poche des papiers compromettants et il réfléchit à la manière de les détruire. Tandis qu' dans les corridors de la pension Jaccarino, il attendait le moment d'être interrogé, il demanda à un fasciste de l'accompagner au cabinet; laissé seul en dedans, il contrôla rapidement ses poches, déchira en tout petits bouts les feuilles qu'il avait, regarda autour de lui, tira la chasse et, couvert par le bruit de la chute d'eau, il ouvrit la petite fenêtre qui en haut donnait de l'air au local, il s'y introduisit ( pour sa et notre chance, il était fort grand et fort mince), il se laissa tomber de l'autre côté et se retrouva dans la rue, libre.

Ce fut par lui, dès lors, que nous fûmes avertis de la trahison de Guglielmo Blasi.

Entretemps, Guglielmo Blasi avait laissé Raoul; celui-ci s'était rendu à la cantine de Duilio Grigioni, via Marc'Aurelio, pour y enlever le matériel explosif et il avait reçu l'ordre de s'y rendre seul. Guglielmo Blasi ne connaissait pas l'adresse, mais il fit en sorte que Raoul fut suivi, de sorte que lui et Duilio furent arrêtés.

Guglielmo Blasi fit ensuite arrêter Silvio Serra et Luigino Pintor.

Il ne restait désormais des Gap libres, mais inutilisables, que six membres : Mario Fiorentini, Franco Di Lernia, Fernando Vitigliano, Carla, Lucia et moi.

Guglielmo Blasi se mit à nous donner la chasse ainsi qu'à tous les camarades avec lesquels il avait eu un quelconque contact politique avant son entrée aux Gap. Il en fit arrêter des dizaines. Son action frappa surtout la zone VI.

Mais se maîtres me voulaient et il fit tout pour me trouver, poussé par les primes qui étaient placées sur ma tête par les Allemands et les fascistes pour un total de 1.800.000 lires.

Il ne connaissait ni mon nom, ni mon refuge. Depuis quelques temps, j'avais abandonné la cantine de Duilio Grigioni et j'habitais dans une maison fournie par Marcello Perez, via Sambucuccio d'Alando. Toutefois, il savait que mon refuge était localisé près de la place Bologna et donc, il se mit à battre cette zone avec l'opiniâtreté de tous les traîtres. Malheureusement, sa chasse donna des résultats positifs car, s'il est vrai qu'il n'eut pas la chance de me rencontrer, son «équipe rencontra et tua en rue, comme un chien, Eugenio Colorni, un dirigeant du Parti Socialiste.

De cette façon, Guglielmo Blasi résolut ses comptes avec la police fasciste et sa situation économique. Il participa aux vols de la bande Koch et empocha les primes de ceux d'entre nous qu'il réussit à prendre.

Il a continué sa carrière même après la libération de Rome, en suivant Koch et sa bande à Florence et à Milan. À la fin de la guerre, il fut arrêté et condamné à perpétuité.

 

(Suite au prochain épisode)


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