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30 avril 2013 2 30 /04 /avril /2013 13:28

INDONÉSIE : LA CONDAMNATION RELIGIEUSE

 

DE L'INNOCENCE JUVÉNILE

 

 

Version française des Dernières Nouvelles de l'UAAR – Union des Athées, Agnostiques et Rationalistes. (29 avril 2013) :

Texte italien : http://www.uaar.it/news/2013/04/29/indonesia-condanna-religiosa-innocenza-giovanile/

 

 

 

Comme disait Boris Vian :

« Les journaux sont pleins de cauchemars
On se tue du matin jusqu'au soir... »

 

et dans la même chanson, opportunément intitulée : « Chantez » :

 

« Ah, comme la vie serait triste
Triste, triste, triste
Ah, comme la vie serait triste
Si l'on ne pouvait pas chanter... »

(http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?id=6981&lang=it)

 

Ou en l'occurrence, « Dansez », s'agissant de petites filles indonésiennes en récréation.

Les amis de l'UAAR relaient un fait-divers assez tragique... L’histoire de petites filles qui s'amusent – comme toutes les petites filles du monde pourraient le faire – à danser et modernité aidant, se filment et mettent ce petit spectacle sur un réseau social. Cette sympathique petite scène scolaire est envoyée aux amis, aux amies et puis entame un fameux tour du monde. Le malheur pour ces enfants, c'est qu'il existe des religieux et des religions (ou l'inverse) et que l’œil et le doigt accusateurs de Dieu n'épargnent pas les petites filles. En fait, comme Dieu est retraité – la création est terminée et les religions chantent sa gloire ! et ce vieillard désœuvré et cacochyme n'a rien d'autre à faire que d'espionner les milliards d'individus qui vivent sur la terre, et même les morts, à ce qu'il paraît

 

Voilà pour le fait-divers et des comme ça, il y en a tout partout, tous les jours.

 

Évidemment, les bonnes âmes de toutes obédiences voient d'un mauvais œil que l'on dénonce de pareilles aberrations, que l'on mette nettement en cause l'imbécillité des religieux et des religions et par goût ou penchant du politiquement correct, elles en viennent à vouloir interdire ce que les religieux désignent sous le nom infamant (à leurs yeux, plutôt glorieux aux nôtres) de « blasphème ». La critique de la religion, des religions et des religieux est l'acte de naissance de la laïcité. Mais il faudra bien qu'ils se résignent tous ces empêcheurs de penser en rond : la critique des religions, en ce compris le blasphème, est un droit et même, un devoir. Sur ce point, comme laïque, on ne peut transiger. Car transiger ce serait renoncer à exister en tant que laïque.

 

Le combat laïque ne fait que commencer.

 

 

 

Les chroniques sont remplies de l'augmentation de la fréquence des demandes de condamnations au nom de Dieu (et de n'importe quel dieu... NdT). Il ne faut pas s'attendre à être à l'abri de l'accusation de violation du sacré ; partout où on se trouve dans la minorité, on peut être dénoncé pour «blasphème». Mais il peut arriver aussi qu'on soit dénoncé, même quand il est évident que la critique de la religion n'existe que dans l'esprit de ceux qui se sentent offensés.

 

La dernière histoire vient d'Indonésie. Elle serait tragi-comique s'il n'en résultait pas que des petites filles se retrouvent face à une lourde peine pour infraction contre l'Islam et en ont déjà subi, indirectement, les conséquences. Cinq élèves d'une école de Tilitoli sur l'île de Sulawesi ont fait une vidéo dans leur salle de classe avec un téléphone alors que d'une manière plaisante, elles alternaient les mouvements de la prière islamique (sholat) avec ceux de la danse sur l'air de One More Night, chanson du groupe Maroon Five. Elles l'ont fait circuler sur YouTube, où elle est devenu virale, ce qui souleva une réaction excessive. Non seulement l'école les a expulsées et elles ne pourront obtenir leur diplôme, mais elles sont également accusées de blasphème pour "offenses à la religion", sur la base du Code pénal indonésien. Elles risquent en théorie un acte d'accusation et la détention. S'en sont également suivi des manifestations de rue des fondamentalistes islamistes contre les filles "blasphématrices". Les autorités religieuses et locales ont appelé à la punition.

 

Une déclaration signée par Sonja Eggerickx, président de l'IHEU(l'organisation internationale laïque dont fait partie de la UAAR), a exprimé sa préoccupation au sujet de l'ostracisme subi par les adolescentes. "Il est incompréhensible que l'on puisse penser que l'expulsion et l'intervention de la police contre des élèves normales qui s'amusent soient nécessaires, voire logiques», dit-elle, «ceux qui pensent que la danse d'une adolescente et la parodie d'une prière est une menace pour leur religion, doivent mûrir eux-mêmes ". Pour la énième fois «le concept de diffamation de la religion est utilisée pour frapper lourdement les individus, en violation des droits et libertés fondamentaux", a ajouté la présidente de l'IHEU, qui renouvelle l'appel aux gouvernements à abolir les lois qui criminalisent le blasphème, souvent utilisées contre les athées et les agnostiques et contre les minorités religieuses, comme les chrétiens (quand et où ils sont minoritaires NdT), de manière instrumentale.

 

 


 

 

Cliquez ici pour voir la video incriminée

 

Il est évident que la vidéo ne critique pas la religion, mais se limite à montrer l'intolérance de certaines pratiques ennuyeuses où les enfants sont contraints de vivre dans une société fortement conservatrice et bigote. Ce n'est certainement pas de jeunes militantes laïques, d'autant que l'une de ces jeunes filles porte même le voile. Cependant, Dieu sait si elles ne le deviendront pas en réaction à la stupidité du fondamentalisme religieux, de moins en moins en mesure de comprendre les jeunes dont le comportement, grâce à l'éducation, à la culture moderne et aux nouvelles technologies semblent être plus laïque que la moyenne. Même dans les pays les plus liés aux traditions religieuses et les plus pauvres.

 

En Indonésie depuis quelques années, pourtant, l'islamisme strict est de plus en plus oppressant. Dans plusieurs États est maintenant appliquée la charia, par exemple, par des bastonnades publiques des femmes "immorales" et la répression des comportements jugés anti-religieux. Comme cela s'est passé contre des dizaines de punks, rasés à zéro, emprisonnés et forcés de suivre des cours d'endoctrinement religieux, tout comme les filles qui osent porter des minijupes. Frappant est également le cas d'Alexander Aan, un jeune officier qui risquait d'être lynché par la foule et a été arrêté pour avoir exprimé son athéisme sur internet et critiqué la religion islamique. L'IHEU a suivi l'affaire en lançant un appel pour demander sa libération et sensibiliser l'opinion publique internationale sur la répression dans le monde dont souffrent les athées et les agnostiques, comme l'a fait l'UAAR par ses propres canaux

 

La protection du sacré n'est rien d'autre qu'une protection des leaders idéologiques contre toute forme de critique à leur endroit. L'histoire des cinq étudiantes indonésiennes montre une fois de plus qu'il n'y a pas de limites réelles à son application indiscriminée. Et ce renoncement face aux exigences des fondamentalistes religieux ne fait rien d'autre qu'alimenter leur désir de forger la société à leur image et à leur ressemblance, et qu'opprimer ceux qui pensent différemment, une tendance qui se manifeste de manière toujours plus agressive sur le mode de «l'intimidation ». Une approche qui nourrit plutôt les conflits fondés sur la religion. Comme ce fut le cas récemment au Bangladesh, où les islamistes par centaines de milliers dans les rues ont appelé à la pendaison des blogueurs athées, contre lesquels le gouvernement a lancé une campagne de répression, des arrestations et des fermetures de sites. Justement l'UAAR, avec d'autres associations humanistes dans le monde, s'est mobilisée pour demander la fin de cette acharnement. Tout cela devrait donner à réfléchir à ceux qui croient que le sentiment religieux a besoin d'être protégé et ceux qui hurlent à l'islamophobie (ou « christianophobie »: le raisonnement ne change pas) lorsque sont mis en question certains aspects, même pas les plus importants, de l'idéologie religieuse. Même quand on le fait involontairement. Pour rendre des concepts abstraits imperméables à toute critique, ils mettent en danger la liberté et la vie de gens de chair et d'os. Ainsi, malheureusement, vont les choses, lorsque les autorités politiques ne mettent pas un frein aux prétentions religieuses.

 

Étant donné qu'en Italie, il y a eu récemment un changement de responsable au sein du ministère des Affaires étrangères, où est désormais en charge Emma Bonino, il est à espérer que notre pays devienne plus sensible à certaines questions. Nous venons de ministres comme Franco Frattini et Giulio Terzi, le premier a prié pour une sainte alliance internationale contre les athées et l'autre souhaitait voir poursuivre ceux qui "offensent" les religions car «personne ne doit se permettre de les ridiculiser ou de plaisanter au sujet de ces valeurs" .

Faire mieux n'est pas difficile, s'employer à ce que l'Italie apparaisse dans le monde comme un pays qui est vraiment engagé dans la protection des droits civils, le sera certainement plus.

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