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16 août 2008 6 16 /08 /août /2008 23:29

 

Clip, clap, clop, tagada, tagada et hop, un petit saut.

 

Telle est aujourd'hui l'entrée en scène de l'âne Lucien qui n'en peut mais...

 

Ah, Ah ! Je t'ai surpris, tu rêvais encore une fois..., dit Lucien, descendant de Lucien dont on ne sait si c'est celui de Samosathe ou celui de Madaure et qui tel le singe Bosse-de-Nage dit Ha, ha !

 

Oui, si tu veux dire ainsi, dit Mârco Valdo M.I.. Mais ce n'est pas exactement ça...

 

Quoi, tu m'as l'air bien sombre, héros !, dit l'âne en se gondolant, c'est-à-dire s'agissant d'un âne, il saute d'un pied sur l'autre, alternativement un pied avant, puis un pied arrière, puis l'autre pied arrière, puis le pied avant correspondant, le tout dans le sens des aiguilles d'une montre, le sens horaire. Ce qui à l'évidence indique qu'il a commencé du pied droit... Mais il ne venait  pas de se lever, ne vous inquiétez pas !

 

Oui, si tu veux dire ainsi, dit Mârco Valdo M.I.. Mais ce n'est pas exactement ça...

 

Ben quoi, qu'est-ce qui t'arrives, mon ami Mârco Valdo M.I.? Te voilà bien triste, tout préoccupé, tout comment dire... angoissé ...

 

Voilà, mon ami Lucien l'âne aux pieds ailés et zélés, je suis à la fois tout à fait content et en même temps, très effrayé de la chanson que je viens de faire... Je dis faire car c'est une parodie et que dès lors, le mot créer ne s'appliquerait que très imparfaitement et même, abusivement, me semble-t-il, ne te semble-t-il pas ?

 

En effet, tu as raison, dit l'âne compatissant, composer n'irait pas mieux, car tu ne connais pas la musique et que je te soupçonne fort de faire des parodies, car là au moins, la musique existe déjà.

 

Tu n'as pas tort, Lucien, et j'ajouterais que le texte aussi existe déjà. Mais ce n'est pas cela qui me tracasse, vois-tu. Le travail du parodiste est quelquefois réduit à la plus simple expression, surtout quand l'auteur de la chanson a du génie et cette fois-ci, pour cette chanson-ci, pour cette parodie-ci, du génie, il en avait et de façon magistrale. Oh, je sais que beaucoup l'ont critiqué, l'ont trouvé dépassé, un peu vieillot, fort ancien, hors jeu en quelque sorte et là, le travail du parodiste donne des clés pour savoir ce qui relève du génie, ce qui est du texte qui passe à travers le temps et ce qui est pure cuistrerie ou confiserie momentanée. Car vois-tu, le parodiste est confronté au texte – plus qu'à la musique qui n'est jamais qu'un substrat, nécessaire certes, mais pas signifiant. Par contre, bien sûr, une musique bien mariée à un texte lui donne une amplitude, une saveur... en somme, la musique, c'est la sauce dans un plat.

 

D'accord, mais où veux-tu en venir ?, dit Lucien un peu abasourdi par un pareil torrent de paroles. Et puis de qui et de quoi tu me parles ?

 

Excuse-moi, mon brave Lucien, mais je continuais – tout haut – ma réflexion intérieure. Bref, tu avais de la pensée à l'état pur, mais elle m'était destinée – à usage interne, en quelque sorte. J'en profite pour te dire que c'est comme ça du matin au soir dans ma pauvre tête et même quand je te parle ou quand je fais autre chose, par exemple, marcher ou conduire ou lire ou manger, bref, à peu près tout, sauf dormir – et encore, ce flot de paroles me traverse en permanence.

 

Eh ben ... dit Lucien, heureusement que je suis un âne. Mais, si je ne perds pas tout à fait le nord, il me semble que tu parlais d'une chanson, de sa parodie et de génie.

 

Oui, oui, exactement. Revenons-y. Dans la parodie d'aujourd'hui, qui est une chanson de chômage, car tu sais que je suis moi-même chômeur et que j'ai promis à mes camarades de faire des parodies dont le thème est le chômage, il y a tellement de génie que je n'ai pas eu grand chose à faire, sauf peut-être d'y penser. Bon, mais pour ne pas rester trop longuement dans le flou artistique, ce génie de la chanson s'appelle Charles Trenet. Je ne vais pas te raconter sa vie, mais sache quand même qu'il a commencé dans les années 1920 et qu'il chantait encore – la dernière fois, en 1999. Il a été le maître de toute la grande chanson française et il a enterré presque tous ses émules. Je dis émules, car c'est un mot qui te plaît bien...

Excuse-moi, Mârco Valdo M.I., mais tu dis tellement de choses en même temps que je n'arrive pas à suivre convenablement. Oui, j'apprécie beaucoup le mot émule et plus les émules de Charles Trenet que ceux du pape. Cependant, tu as dit que la chanson de Trenet – et je ne sais toujours pas laquelle – était tellement pleine de génie que tu n'as eu qu'à y penser et ta parodie était faite... C'est très intriguant... Dis-moi.

 

Oui, c'est comme ça. Pour cette parodie, j'ai chantonné Trenet et la chanson est venue d'elle-même. J'ai juste dû changer un mot, un seul. Tu imagines...

 

Euh, oui... dit l'âne Lucien, vraiment désarçonné, ce qui est singulier pour un âne.

Enfin, je comprends... Enfin, je ne comprends rien...

Quelle peut donc bien être cette chanson ?

 

Tout simple, dit Mârco Valdo M.I., c'est Je Chante et je n'ai eu qu'à remplacer « chante » par « chôme »... « Je chôme soir et matin, », tu vois tout de suite, la gueule que ça a.

 

Oh, oh, c'est vrai que c'est du génie..., dit l'âne tellement estomaqué qu'il en plie les genoux.

 

Et bien, dit Mârco Valdo M.I., ce génie-là s'appelle Trenet. Crois-moi, tu verras, pas un mot de changé et ça colle au milipoil. Du génie et une puissance d'expression... renversante. Mais et c'est là que j'ai commencé à réfléchir avec plus de gravité, ma première réjouissance passée, je me suis aperçu que cette chanson, parodiée comme ça, débouchait sur la réalité tragique de mes camarades chômeurs qui se suicident.

 

Quoi, des chômeurs se suicident... ? Et pourquoi ? Car ils sont chômeurs ? Ben vous les humains, vous avez de ces manières... Faire mourir vos semblables.... pour rien, en quelque sorte, car il y a tellement de choses, de vivres,  de nourritures, de moyens, d'argent... qu'il suffirait de partager... même un peu pour commencer. Vous pourriez aussi répartir la charge de travail... Mais enfin, moi, je suis un âne... et ce que je dis, c'est ce que j'en dis...

 
 

Oui, dit Mârco valdo M.I., il y a des chômeurs qui se suicident... De désespoir, sans doute; de rage aussi, peut-être; en fait, je pense bien et crois-moi, je le ressens étant l'un d'eux – je pense bien qu'ils se suicident tellement le monde environnant les méprise, tellement les fonctionnaires les rudoient, tellement les contrôleurs les poursuivent, tellement même, crois-moi, leurs anciens camarades de travail les oublient, même eux, si, si... Enfin, tellement ils sont humiliés, tellement ils souffrent, tellement ils étouffent, tellement on les presse de trouver l'introuvable, le Graal, la Pierre philosophale, l'Atlantide, que sais-je... Tellement on les somme de chercher des emplois dont tout le monde sait qu'ils n'existent pas... Crois-moi, on les pousse à la folie, puis naturellement, au suicide et pire encore,  je pense que c'est  VOLONTAIREMENT.  Car, comment expliquer qu'un être pensant, ayant connaissance de tous les éléments du problème, sachant qu'il y a des centaines de milliers, des millions de chômeurs et énormément moins d'emplois, comment un être raisonnable et honnête peut exiger d'autres êtres pensants de trouver des emplois qui n'existent pas et des emplois que pour des raisons tout aussi absurdes, on ne veut pas créer ? Un tel dilemme - celui du chômeur - ne peut déboucher que sur la folie et finalement, sur le suicide.

Enfin, mon bon ami Lucien, regarde toi-même la chanson et tu me comprendras.... Une dernière chose cependant, je ne vois littéralement pas quelles images je pourrais mettre ici... alors, pour une fois, il n'y en aura pas.

Sauf, peut-être, les coquelicots. J'avais une amie chômeuse et la dernière fois que je l'ai vue... comme un petit coquelicot, mon âne, comme un petit coquelicot...


 

  Mais, sur le corsage blanc,

Là où battait son coeur,

Y avait trois gouttes de sang

Qui faisaient comme une fleur :

Comme un petit coquelicot, mon âme !

Un tout petit coquelicot.

 


Je Chôme

 

 

 

Parodie de Je Chante de Charles Trenet et Paul Misraki par Marco Valdo M.I.

qui n'a changé qu'un seul mot ... Le génie de Trenet...

 

 

Je chôme !
Je chôme soir et matin,
Je chôme sur mon chemin
Je chôme, je vais de ferme en château
Je chôme pour du pain je chôme pour de l'eau
Je couche
Sur l'herbe tendre des bois
Les mouches
Ne me piquent pas
Je suis heureux, j'ai tout et j'ai rien
Je chôme sur mon chemin
Je suis heureux et libre enfin.

 

Les nymphes
Divinités de la nuit,
Les nymphes
Couchent dans mon lit.
La lune se faufile à pas de loup
Dans le bois, pour danser, pour danser avec nous.
Je sonne
Chez la comtesse à midi :
Personne,
Elle est partie,
Elle n'a laissé qu'un peu de riz pour moi
Me dit un laquais chinois

 

 

Je chôme
Mais la faim qui m'affaiblit
Tourmente
Mon appétit.
Je tombe soudain au creux d'un sentier,
Je défaille en chantant et je meurs à moitié
"Gendarmes,
Qui passez sur le chemin
Gendarmes,
Je tends la main.
Pitié, j'ai faim, je voudrais manger,
Je suis léger... léger..."

 

Au poste,
D'autres moustaches m'ont dit,
Au poste,
"Ah ! mon ami,
C'est vous le chômeur vagabond ?
On va vous enfermer... oui, votre compte est bon."
Ficelle,
Tu m'as sauvé de la vie,
Ficelle,
Sois donc bénie
Car, grâce à toi j'ai rendu l'esprit,
Je me suis pendu cette nuit... et depuis...

 

Je chôme !
Je chôme soir et matin,
Je chôme
Sur les chemins,
Je hante les fermes et les châteaux,
Un fantôme qui chôme, on trouve ça rigolo
Je couche,
Parmi les fleurs des talus,
Les mouches
Ne me piquent plus
Je suis heureux, ça va, j'ai plus faim,
Heureux, et libre enfin !

 

 

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28 juin 2008 6 28 /06 /juin /2008 22:36

Ah, te voilà ! D'où viens-tu comme ça ?, dit Marco Valdo M.I. en regardant l'âne claudiquer cahin-caha sur le chemin caillouteux.

Mon ami, tu ne devineras jamais ce qui m'est arrivé. À moi, l'âne noir, venu de Samosathe ou peut-être d'Éphèse; ça, ça reste un mystère. Ce qui m'est arrivé aussi d'ailleurs.

En tout cas, tu m'as l'air vraiment choqué, comme si on t'avait battu.

Bof, battu, ce n'est rien, nous, les ânes, on a l'habitude et le poil très résistant. Si ce n'était que battu... C'est bien pire, crois-moi.

Et quoi donc, Lucien. Quel est ce mystère ? Qu'a-t-on bien pu te faire pour te mettre dans cet état ?

Je t'ai dit que tu ne devineras jamais. Et c'est bien vrai. Mais pour me faire sourire, essaye quand même – là je t'ai donné une rime, une indication... Pour un poète comme toi, ce doit être une clé.

Bon, ça va. Je cherche, mais pas trop longtemps. Si on ne t'a pas battu, tu as eu un accident. Un camion t'a foncé dedans ?

Non, dit Lucien, ce n'est pas ça. Tu gèles.

Un boucher t'a poursuivi avec un grand couteau ? C'est affolant, ça, pour un âne. Tu aurais pu finir en boudin, mon ami Lucien.

Non, non, pas du tout. Tu gèles toujours., dit l'âne sarcastique. Cherche mieux.

Tu es tombé dans un profond fossé ou dans un ravin ?

Là, tu vas me vexer, moi et tous mes congénères. Nous ne tombons pas dans les fossés. Au pire, on nous y pousse, on nous y jette, mais nous n'y tombons pas. Et même, si tu veux le savoir, on ne m'y a pas jeté. Du moins, dans un vrai ravin.

Ah, dit Marco Valdo M.I., je commence à voir, on t'a fait mal, mais pas physiquement.

Maintenant, dit l'âne en commençant à sourire, tu chauffes et fort.

Quelqu'un t'a insulté ?

Non, dit l'âne.

Quelqu'un t'as injurié ?

Non, dit l'âne.

On t'a crié dessus.

Non, dit l'âne. Et de toute façon, comme tous les ânes, je m'en fous qu'on me crie dessus.

On t'a menacé de te battre à mort ?

Non, dit l'âne. Je vais te le dire, car tu ne trouveras jamais. On m'a convoqué à l'Onem pour un contrat.

Pas possible. Toi, un âne. Ce n'est pas possible, Lucien.

Et bien, si. Le contrôleur m'a montré mon dossier, ils ont été rechercher qu'au départ, j'étais un homme, que j'avais vingt ou vingt-cinq ans et ils m'accusent de me déguiser en âne pour échapper au contrôle et pouvoir travailler en noir. Comme si j'avais envie de travailler ? A-t-on idée ? Faut être un humain pour avoir des idées aussi saugrenues, mais passons. Ils m'en ont tellement dit que voilà, pour avoir la paix et mettre fin à leur harcèlement, j'ai signé un contrat et je suis obligé, moi, un âne de chercher un emploi. C'est la pire des humiliations.

Voyons, Lucien mon ami, ne dis pas ça. Ils l'ont fait pour ton bien. Ils veulent seulement t'activer.

Mais je ne veux pas être activé, ni par devant, ni par derrière., dit l'âne noir de colère.

Mais calme-toi, Lucien. Je ne t'ai jamais vu aussi remonté. Je te dis qu'ils veulent t'aider...

Et puis quoi encore, dire merci, peut-être ? Si tu veux me faire plaisir, fais-moi une chanson, une de tes parodies, pour me consoler. Là, je dirai – et avec plaisir encore – merci.



 



Dis Merci !

Chanson de chômage.


Quand ton boulot détale
Par un soleil d'été
Et que ta femme cavale
Car tu n'as plus de blé
Quand l'ombre et la lumière
Dessinent sur ton corps
Les traces de ta misère
Tu peux aller encore

À l'Onem, à l'Onem, à l'Onem
Au Forem, au Forem, au Forem

Quand ton pain se fait vieux
Quand ton pain se fait dur
Quand le rire dans tes yeux
D'un seul coup n'est plus pur
Toi tu voudrais dire non
À ce foutu contrat
Ton honneur lui dit non
Mais tes mots ne viennent pas

À l'Onem, à l'Onem, à l'Onem
Au Forem, au Forem, au Forem

Quand tu n'es plus toi-même
Plus rien qu'un numéro
Rien qu'une goutte d'eau
Dans un océan statistique
Quand tu es contrôlé,
De façon systématique
Quand tu es harcelé,
Tu angoisses, tu paniques

 

À l'Onem, à l'Onem, à l'Onem
Au Forem, au Forem, au Forem

Tu ne sais pas, tu ne sais plus
Si tu existes encore
Quand on t'a fait la chasse
Comme on fait à la guerre
Quand c'est toi le soldat
Qui meurs et qui la perds
Quand enfin on t'excluera
Car il n'y a pas d'emploi pour toi.


Dis merci !, à l'Onem, à l'Onem
Dis merci !, au Forem, au Forem

 


"Que je t'aime..." Chanson de Johnny Halliday - Paroles: Gilles Thibaut. Musique: Jean Renard   1969

"Dis merci ..." Parodie de Marco Valdo M.I. 2008


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24 juin 2008 2 24 /06 /juin /2008 19:55

Tiens, Lucien. Comment ça va ?

Pas mal et toi. Qu'as-tu à me proposer ce soir ? dit l'âne en clignant des paupières comme pour aguicher.
Oh ! pas grand chose. Juste une petite chanson de chômage. Une nouvelle.
Ah! Ah !, dit l'âne, singeant le singe Bosse de Nage. Et qu'est-ce qu'elle raconte ?
C'est une sorte de lamentation. La lamentation d'un fonctionnaire qui doit contrôler et de ce fait, exclure les chômeurs de leur statut. Ce qui veut dire en clair : leur couper les vivres, leur enlever leur allocation. Bref, les basculer dans la misère sociale. Déjà que d'être chômeur, c'est pas vraiment facile. Mais là, tout se complique vraiment. Surtout quand le chômeur a une famille, qu'il a des enfants.

Ils sont fous ces humains, dit l'âne en braiant de rage.


On ne pourrait mieux conclure, dit Marco Valdo M.I.

Ainsi, j'ai envoyé ce petit texte à quelques amis, mais je crois qu'il serait bien aussi ici, à la disposition de tout qui veut le voir. Et j'avais accompagné mon envoi d'un petit commentaire; le voici.

Vous connaissez tous les malheurs des chômeurs (668.000 aux dernières nouvelles...; ceux rétribués par l'Onem - sans compter les exclus et ceux qui n'ont même pas de droits).
Ici, en Belgique, il y a actuellement une chasse aux chômeurs menée par l'Office National de l'Emploi (Onem) et dont les acteurs de terrain, les exécuteurs sont les contrôleurs.
Je leur ai dédié cette chanson; très belle, d'ailleurs. C'est évidemment une parodie, un genre que je pratique volontiers.

Vous trouverez sans doute aisément dans vos souvenirs et sur Internet- si votre mémoire est défaillante, la chanson de Brassens, intitulée : "Le Fossoyeur".
On cherche chanteur... ou chorale.
Pour d'autres de mes parodies sur le chômage (il y en a une série L'avenir en rose, Je chôme, tu chômes, on chômera..., Dans la vie, faut chercher un emploi, ... etc ; faut chercher un peu, mais...), je renvoie à mon blog  (vous y trouverez aussi d'autres choses).

Je vous salue bien.
OsR.



Le Contrôleur

Je travaille à l'Onem depuis longtemps
Je suis chargé d'exclure des gens
Mais si je n'excluais pas
C'est moi qu'aurais plus d'emploi


J'suis un pauvre contrôleur

Il y a des gens qui croient que j'ai du bonheur
A gagner mon pain sur l'dos des chômeurs
Mais ça m'tracasse et d'ailleurs
J'les exclus à contrecœur

J'suis un pauvre contrôleur

Et plus j'exige qu'ils cherchent de l'emploi
Et plus les chômeurs se foutent de moi
Y m'dis'nt: " Mon vieux, des emplois
Tu sais bien qu'il n'y en a pas !"

J'suis un pauvre contrôleur

J'ai beau me dire que c'est officiel
J'peux pas trouver ça tout naturel
Et jamais je ne parviens
Dans ce boulot, à être bien


J'suis un pauvre contrôleur

Ni vu ni connu, chômeur adieu !
Si du fond d'la terre, on voit l'Bon Dieu
Dis-lui l'mal que m'a coûté
De t'avoir ainsi jeté.


J'suis un pauvre contrôleur


« Le contrôleur »

Parodie de la chanson « Le Fossoyeur » de Georges Brassens – 1952.




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19 juin 2008 4 19 /06 /juin /2008 17:26

Salut, dit l'âne en s'ébrouant pour faire tomber l'eau du ciel de son dos. Quoi de neuf aujourd'hui ?  Une petite chanson peut-être ? Une petite chanson pour le chômage ? Une histoire de chômeur ?  Quoi ?

T'as bien deviné, Lucien. J'ai pensé que pour un récital, je n'avais pas écrit assez de chansons. Alors, je viens d'en faire deux autres.

Toujours avec le même principe. Toujours des parodies ? demande en souriant de ses dents immenses, Lucien, l'âne hellène. Mais avant de me répondre, laisse-moi te dire d'où je viens et comment et pourquoi je suis devenu un âne, car comme tu le sais, peut-être, je devrais être un homme, si ce n'avait été cette sorcellerie. Écoute ce que disait le récit antique duquel j'ai pu m'échapper pour converser avec toi. Je situe l'action. Palaistra, mon amante, est la servante de la sorcière et elle s'est arrangée pour me faire voir sa patronne se transformer en oiseau en s'enduisant d'une certaine huile, une huile essentielle, sans laquelle rien n'aurait été possible. Puis, à ma demande, Palaistra a subtilisé l'huile et m'en a enduit le corps pour que je devienne un oiseau, un de ces beaux aigles au port impérial; enfin, c'est comme ça que j'imaginais les choses. « 
Mais, malheureux ! je ne deviens pas oiseau ; c'est une queue qui me sort de derrière, mes doigts disparaissent tous je ne sais où ; je n'avais plus que quatre ongles en tout, qui n'étaient rien d'autre que des sabots ; mes mains et mes pieds étaient des pieds de bête, les oreilles étaient longues, le visage large. Me passant en revue, je me vis âne, et je n'avais plus de voix humaine pour m'en prendre à Palaistra, mais, allongeant la lèvre et la regardant ainsi de travers, tout comme un âne, je lui adressais autant de reproches que je pouvais, devenu âne au lieu d'oiseau.

Elle se frappe le visage des deux mains. « Misérable que je suis ! Quel malheur j'ai fait là ! Dans ma hâte, j'ai été trompée par la ressemblance des boîtes, et j'en ai pris une autre, au lieu de celle qui fait pousser des plumes. Mais courage, mon chéri : le remède est aisé. Il te suffit de manger des roses ; tu te dépouilleras aussitôt de la bête et redeviendras mon amant. Cette nuit du moins, chéri, reste sous forme d'âne ; à l'aube, je courrai te chercher des roses que tu mangeras, et tu seras guéri. Tout en parlant, elle me caresse les oreilles et le reste du corps. » (tiré de Onos de Lucien de Samosathe ; la traduction est celle du professeur Michel Dubuisson de l'Université de Liège).

Funeste erreur, mais pire encore, je n'ai jamais eu mes roses et donc, me voici environ deux mille ans plus tard. Enfin, ce n'est pas tout à fait exact, j'ai eu mes roses et je suis redevenu un humain, mais comme tel, je suis mort depuis longtemps et j'ai survécu sous la forme de l'âne noir. Mais, tu le sais bien Marco, nous sommes des enfants de la littérature; une bonne mère, soit dit en passant. Bon, maintenant, revenons à tes parodies. Dépêche-toi, j'en raffole.

 

Voilà, Lucien mon ami, toi qui parlait déjà des salariés dans l'Antiquité, j'ai fait deux nouvelles parodies qui stigmatisent le chômage et le traitement qu'on fait subir aux chômeurs. Comme il est de coutume pour une parodie, j'ai choisi des chansons connues. Elles ne sont pas de la même trempe, mais elles serviront toutes les deux fort bien mon objectif. La première que j'ai parodiée est fort connue et déjà bien ancienne; elle s'intitule : « Dans la vie faut pas s'en faire », un principe qui t'aurait bien aidé dans tes tribulations attiques. Elle me reste dans l'oreille dans une version que chantait Maurice Chevalier en roulant l'r à la parisienne, c'est -à-dire en envoyant la langue vers le haut du palais L'autre, la seconde, s'intitule « En sortant de l'école » et elle est de Jacques Prévert, autre parisien.

Et maintenant, si tu le veux bien, place à la chanson.

 

Dans la vie, faut chercher un emploi

 

 

Licencié par mes patrons
Une fois, le préavis épuisé
J'étais stressé, je n'avais plus un rond
J'étais paumé, ma femme était partie
Tout autre que moi se serait dit
Tout ça, ça ne va pas aller
Il se serait tué d'un coup de couteau
Empoisonné, foutu à l'eau
Pendu ; bref, suicidé
Moi, je suis allé à l'Onem
Et j'arrête pas de lui répéter :


Dans la vie faut pas s'en faire
Moi je ne m'en fais pas
Toutes ces petites misères
Seront passagères
Tout ça s'arrangera
Je n'ai pas un caractère
A me faire du tracas
Croyez-moi sur terre
Faut jamais s'en faire
Moi je cherche un emploi

Quand je rentre chez moi
C'est un vrai calvaire
Je vois tout ce que je dois
Tout ce qu'il faudrait pour bien faire
Et comme je n'ai plus de quoi
Plus personne, plus de salaire
Je ne suis plus du premier âge
Et bien loin de la pension
Il ne me reste que mon courage
et mon allocation.

 

Dans la vie faut pas s'en faire
Moi je ne m'en fais pas
Je vais à l'Onem
Je fais confiance au Forem
Je cherche un emploi
Je n'ai pas un caractère
A baisser les bras
Croyez-moi dur comme fer
Moi, je sais y faire
Je trouverai un emploi.

 

Je suis allé au Forem
Réclamer un emploi
On m'a dit cherchez vous-même
Pour vous, on n'en a pas
C'est comme ça le Forem
Quand on n'a pas d'emploi.
Je me suis motivé moi-même
J'ai fait toutes les boîtes d'interim, mais ça sert à quoi
De faire des lettres, de se présenter soi-même
Quand il n'y a pas d'emploi.

 

Dans la vie faut pas s'en faire
Moi je ne m'en fais pas
Je vais à l'Onem
Je fais confiance au Forem
Je cherche un emploi
Je n'ai pas un caractère
A me faire du tracas
Croyez-moi sur terre
Faut jamais s'en faire
Moi je cherche un emploi


Chanson « Dans la vie faut pas s'en faire » de Albert Willemetz. Musique: Henri Christiné   1921

Parodie Marco Valdo M.I. 2008

En sortant de l'école



En sortant de l'école
nous avons rencontré
Tout un tas de mystères
qui nous ont emmenés
tout autour de la terre
chercher un emploi salarié


Tout autour de la terre
nous avons recherché
les emplois qui se cachaient
sous les coquillages
dans des îles parfumées
et puis, nous avons fait naufrages
et notre bateau a coulé.

Au-dessus de la mer
nous l'avons cherché
Nous, les trois mousquetaires
dans la lune et les étoiles
sur un bateau à voiles
Nous sommes allés au Japon, en Angleterre
pour trouver à travailler
plongeant au fond des mers
à la poursuite d'emplois salariés.

Revenant sur la terre
nous avons rencontré
sur la voie de chemin de fer
des emplois qui fuyaient
fuyaient tout autour de la Terre
fuyaient tout autour de la mer
fuyaient devant l'hiver
qui lui aussi voulait les attraper

Mais nous sur notre chemin de fer
on s'est mis à rouler
rouler derrière l'hiver
et on l'a écrasé
et la maison s'est arrêtée
et un patron nous a engagés

C'étaient des emplois intérimaires
et il nous a bien remerciés
et toutes les fleurs de toute la terre
soudain se sont mises à pousser
pousser à tort et à travers
sur la voie du chemin de fer
qui ne voulait plus avancer
de peur de nous réveiller

Alors on est revenu à pied
à pied tout autour de la terre
à pied tout autour de la mer
tout autour du soleil
de la lune et des étoiles
A pied à cheval en voiture
et en bateau à voiles.
 
Poème et chanson de Jacques Prévert
Parodie de Marco Valdo M.I. 2008

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11 juin 2008 3 11 /06 /juin /2008 16:48

Ah, dit l'âne aux yeux de braise, où étais-tu hier ? Je t'ai cherché un peu partout.


Bah, répond Marco Valdo M.I., j'ai été manifester; ça m'arrive assez fréquemment.

Et ça a été, ta manifestation ?, demande l'âne en levant le menton.


Pas mal, pas mal. Il y avait un soleil resplendissant, ce fut une belle promenade. Et une promenade dans cette petite ville de province où l'on n'avait plus manifesté depuis bien longtemps; en dehors de certaines manifestations locales. Là, les gens étaient venus de plus de cinquante kilomètres à la ronde. On y avait pas vu tant de monde (sauf pour les fêtes annuelles, mais c'est autre chose) .


Et comment c'était, je veux dire pour celui qui la voyait passer la manifestation ? , demande l'âne décidément très curieux.


Comme la ville est petite, ancienne et que donc les rues sont étroites, il y avait une sorte de long serpent très coloré qui se glissait comme il le pouvait dans le dédale local. Tu connais bien les habitudes dans les manifestations : il y a les rouges (nous), les verts, les bleus. Tout le monde avec des foulards, des casquettes, des vestes, des chemises, des ballons, des pancartes...

C'était bien aussi pour les bruits, les explosions, les chants, la musique. Crois-moi, malgré la gravité du sujet de mécontentent, ce fut festif et bonenfant. Une vraie, un grande fête !

Et encore, comme je t'ai dit, on n'a pas fait le plein, car la mobilisation était réduite ; il faut se demander ce qui se serait passé, si on avait fait une mobilisation générale. Pour te donner une idée, disons qu'on était entre 10 et 15 % de ce qu'on aurait pu mobiliser. A la grosse louche, on était une vingtaine de milliers; ça fait du monde. Imagine qu'on soit tous venus....


Au fait, dit l'âne en se frottant le menton sur le genou droit, c'était quoi votre truc. Pourquoi vous étiez si nombreux à vous rassembler ?


Écoute, Lucien, c'est un peu difficile à expliquer, mais pour dire, comment dire, on en a un peu marre de ce système où certains profitent odieusement des autres. Un peu comme les hommes profitent des ânes, tu sais, comme on leur fait porter toute la charge pour un peu de son ou même, pour rien, en leur faisant bouffer des chardons ou les herbes du bord du chemin. Et si t'es pas d'accord, comme pour vous les ânes, quand il n'y a plus de carottes, ils te mettent le bâton.


Ils font ça aux autres hommes, dit l'âne tout ébahi. Ben, ça alors ! Mais c'est de l'exploitation ! C'est scandaleux ! C'est ignoble!


Je ne te le fais pas dire, Lucien, mon ami. D'ailleurs, je suis plus ami avec toi, Lucien, qu'avec bien des humains.


Mais, dit Lucien, l'âne en se frottant le museau sur une pierre, puis en croquant un chardon en fleur, mais, si je comprends bien, vous commencez à vous défendre. Imagine, si nous les ânes, on arrivait à vingt mille dans les rues d'une ville... Dis-moi, comment ils expliquent que certains ont plus que d'autres ? Chez nous les ânes, ça irait vite. Ceux-là, des profiteurs, on les pousserait dans le fossé et on les piétinerait.


Oui, mais vous, vous êtes des ânes, tandis que nous... Enfin, bof, ils disent que chez les humains, c'est normal, que c'est la civilisation, que c'est la loi naturelle, que les choses ont toujours été ainsi, que certains ont plus de droits que d'autres, qu'ils sont plus malins, que leurs parents en avaient déjà... Mille raisons absurdes ! Et pour asseoir tout çà, ils ont des polices, des armées et ils font les lois; enfin, leurs lois. Ils donnent du travail à certains, ils chassent les autres, ils inventent des ennemis; bref, ils les font toutes. Et encore, je ne te dis pas ce qu'ils font aux humains d'Afrique ou d'Amérique du Sud ou d'Asie. Crois-moi, vaudrait mieux être des ânes.


D'accord, dit Lucien, l'âne aux dents jaunes et à la longue langue rose, t'as rien écrit là-dessus ?


Si, si. D'ailleurs, j'ai des amis suisses. Tu sais, Lucien, que j'ai des amis suisses.


Oh, oui ! dit l'âne tout souriant, moi aussi, j'ai des amis suisses et les Suisses sont des gens très calmes, très pondérés, qui expriment leurs idées avec prudence et qui font très attention à ce qu'ils disent. Oui, mais quoi, avec tes amis suisses ?


Et bien, figure-toi, mon cher Lucien, mes amis suisses, qui vivent dans un des pays les plus capitalistes (c'est le cœur des banques mondiales) et les plus libéraux du monde, connaissent particulièrement bien le libéralisme et le capitalisme, c'est-à-dire le système qu'on veut nous imposer et que de fait, on nous impose par les armes... Donc, mes amis suisses ont écrit un petit texte sur tout ça, pour dire comment ça se passe et ce qu'est ce fameux libéralisme, comme il fonctionne et ce qu'il fait et ce qu'il veut faire aux hommes et aux peuples de la terre. Ils disaient ça pour la Suisse et moi, je l'ai un peu adapté pour l'ensemble des pays et des peuples. Tu vas voir. Je l'ai intitulé : Le capitalisme, le libéralisme et la guerre sociale.



Le libéralisme, le capitalisme et la guerre sociale



On ne combattra pas le libéralisme seulement avec de bons sentiments et des injonctions morales. On ne le fera pas reculer par l’invocation de droits fondamentaux qui incarneraient une partie essentielle de la culture humaine. On ne résistera pas au libéralisme en rappelant l’intérêt bien compris de «notre» économie, l’apport des immigrés à la « richesse nationale » ou leur place dans un monde du travail où ils occupent les emplois dont personne ne veut.

On ne fera pas reculer le libéralisme à coups de référendums ou d’initiatives et encore moins en élisant des gens qui partagent le pouvoir étatique et mettent en œuvre (avec plus ou moins de mauvaise conscience et plus rarement encore de réticence) les politiques traditionnelles dans ce pays.

Toutes les forces qui demandent, au minimum, davantage de respect et de souci pour la personne humaine font un travail utile. Mais cela ne suffit pas. Il faut précipiter la rupture d'avec le libéralisme. Pour cela, les populations doivent trouver une aide organisationnelle, politique et culturelle pour identifier, faire reconnaître et défendre leurs intérêts. Les luttes quotidiennes doivent s’ancrer dans un travail de longue haleine pour construire une autre vision du monde, de la politique, de la communauté et de la transformation sociale.


Domination, conformisme généralisé et barbarisation


Le système capitaliste, patriarcal et étatiste impose aux gens d’en bas une situation de déni, de souffrance et d’insécurité sociale. La classe moyenne, base traditionnelle du libéralisme, subit elle aussi cette barbarisation des rapports sociaux.

Entre la politique effectivement menée par le libéralisme et les aspirations de la population, il existe une situation de tension permanente. Elle peut provoquer des déchirements importants. Pour juguler ces tensions sur les questions sociales qui soulèvent des intérêts immédiats et concrets, le libéralisme doit produire des dérivatifs puissants. Cela le pousse à radicaliser ses opérations xénophobes et racistes. Il doit aussi renforcer sa proposition politique générale : État autoritaire, répression et contrôle généralisés, liquidation des conquêtes et des protections sociales, saccage des politiques et des mécanismes de redistribution, démantèlement du service public.

La politique générale du libéralisme est inséparable d’une exigence de soumission et de conformisme généralisé : télévision, sécurité, civilité, flexibilité, mobilité, tout ça sont des ingrédients majeurs de leur politique.

La lutte pour l’égalité sociale

Le libéralisme doit être combattu en mettant au premier plan les intérêts et les besoins des populations, c'est-à-dire de tous les dominés, avec une exigence d’égalité sociale. L’égalité sociale appelle une lutte de longue durée qui vise une transformation radicale de la société mais aussi avec des objectifs précis, des revendications spécifiques et des luttes partielles.

L’égalité sociale, c’est l’égalité entre toutes les personnes, leur égale participation à l’institution de la société, au partage du pouvoir et à l’appropriation sociale des produits et des richesses. Seule une telle exigence peut permettre aux populations et aux groupes sociaux dominés de se reconnaître dans un projet commun, de combattre ensemble, de s’émanciper des classes dominantes.

La pleine réalisation de l’égalité sociale exige un projet socialiste, démocratique, autogestionnaire et libertaire. Un tel projet se concrétise dans une politique de libération, de généralisation de l’action directe populaire, d’extension et d’approfondissement de l’auto-organisation. C’est un projet de travail politique capable d’accumuler efficacement des avancées sur tous les terrains. L’égalité sociale, c’est le moteur et la tension qui font avancer nos luttes et qui libèrent et qui civilisent la société.


Construire la résistance populaire


L’essentiel de la politique de libération se situe en dehors de l’activité politique institutionnelle. L’important, c’est la construction systématique d’une résistance généralisée qui permette à tous les groupes sociaux dominés de trouver une communauté d'action, de vie, d'existence, de culture..., d’arracher davantage de liberté et d’égalité et de forger ensemble un projet d’émancipation commun.

Une telle démarche implique que la résistance rompe avec toutes les politiques de gestion du système, y compris avec les politiques social-libérales.

La résistance implique la lutte pour changer le sort des majorités sociales qui, à un titre ou à un autre, depuis une position ou l’autre (genre, origine, appartenance ethnique, appartenance de classe, âge, etc.), sont dominées, exploitées, aliénées, niées dans leur identité et leurs droits. Le libéralisme impose une domination fondamentale à laquelle il faut répondre fondamentalement.


Le libéralisme aime les immigrés


Cela peut sembler paradoxal, mais le libéralisme aime les immigrés. Pas seulement parce que les patrons exploitent les immigrés avec ou sans papiers, quel que soit leur statut, leur nationalité, leur origine ou la pigmentation de leur peau, mais aussi, et plus généralement, parce que l’opposition mise en scène par le libéralisme entre immigration et communauté nationale sert à conforter une identité illusoire et des solidarités imaginaires entre «nationaux». Le libéralisme propose une lecture du monde, des catégories pour décoder et interpréter la réalité sociale.

Le libéralisme crée de puissants dérivatifs politiques, culturels et symboliques pour masquer au peuple sa condition sociale réelle. La question sociale est expliquée et traitée par le biais de l’abus et de la concurrence entre l’étranger et le national.

Boucs émissaires

Le libéralisme vend le projet du retour à une société traditionnelle qui «offrirait» à chacun la sécurité pour peu qu’il respecte l’ordre social, la hiérarchie et accepte son statut. Mais la soumission à l’ordre social et au pouvoir qu’il demande est contrebalancée par une série d'avantages mineurs offerts à des catégories intermédiaires qui servent à encadrer les populations.

L’immigration est représentée en figures menaçantes ou criminelles. La dernière en date étant l’immigré naturalisé.

En fait, le libéralisme, pour se maintenir, doit ruiner toute possibilité d’organisation et de défense collectives. C'est pourquoi, notamment, il veut ramener les pauvres et les précaires à une misérable assistance aux démunis, obligés de courber la tête et de faire allégeance pour mériter la charité publique. Par cette méthode exemplaire, il mène la guerre sociale contre les salariés dans leur ensemble, contre tous les dominés.

Le libéralisme masque l’insécurité sociale généralisée, la fragilisation de la vie des gens, le mouvement de précarisation de l’ensemble des salariés (y compris de ses couches les mieux qualifiées, les mieux payées et socialement les mieux intégrées) par la proclamation d’une insécurité relevant de l’action pénale et policière. Cette insécurité prend chaque jour plus clairement des connotations d’une criminalité ethnique, raciale et sociale. Immigrés, pauvres, précaires, prolétaires… Pour le libéralisme, voilà la source de l'insécurité, voilà d'où vient le danger, voilà la cause de la dégradation des conditions de vie, voilà l'ennemi à combattre.



Le libéralisme contre la liberté



Le libéralisme veut briser les espaces démocratiques conquis par les populations. Toutes les libertés qui ont facilité la construction d’organisations, de communautés et de cultures populaires doivent être saccagées. L’état d’exception imposé à des fractions entières de l’immigration préfigure le conformisme généralisé et la répression rampante pour tous.

Mise au pas, mise au silence, politiques d’exception, impossibilité de construire des organisations de défense populaires, tel est le vrai programme du libéralisme. Même si cette mise au pas avance masquée, sous les oripeaux d’une dénonciation hargneuse des abuseurs, des étrangers, des dominés.



Les bourgeois aiment le libéralisme



La bourgeoisie a besoin d'immigrés, de pauvres, de précaires, de prolétaires qui soient aussi précaires et privés de droits que possible. Le libéralisme les lui procure. Les libéraux font de l’insécurité un thème-clé de l’espace public. Du coup, tout est de la faute des immigrés, de pauvres, de précaires, de prolétaires . Les classes dominantes qui détiennent le pouvoir et exploitent les populations n’ont plus aucune responsabilité dans la dégradation des conditions de vie de l'immense majorité de la population.

Le libéralisme n’est pas simplement le fait d'un parti. Le parti libéral ou tout parti apparenté (en Belgique : M.R., VLD) ne se présentent pas non plus sous la forme d'une formation classique de type fasciste ou nazie. Et pourtant, ils sont à la fois, un parti d’attaque et un parti de refondation sociale. Une base populaire est un atout essentiel pour ces partis bourgeois dans leur stratégie et leur projet; d'où, la véritable cour que font les libéraux aux « bons travailleurs », aux « travailleurs responsables », à ceux qui ne font jamais grève, aux non-syndiqués....

Le libéralisme lutte pour un projet de capitalisme total. Il implique la soumission politique, sociale, culturelle et idéologique à un ordre qui postule qu’on ne peut pas combattre les classes dominantes mais aussi que leur domination est légitime, qu'elle est juste et seule apte à protéger le pays, la société, les personnes; qu'elle est aussi la seule capable d'assurer le développement économique, la prospérité, la sécurité...

Le libéralisme, en tant que conception de la vie sociale, en tant que fondement politique, mène dans les faits une politique favorable à la globalisation capitaliste, qui n'est rien d'autre que le libéralisme appliqué à l'échelle de l'espèce humaine.



Le libéralisme contre les droits des immigrés



Le libéralisme n’a aucune intention d’expulser massivement des immigrés. Sa politique procède par une action répressive sélective, «exemplaire», ponctuelle; d'où, son refus systématique d'une réglementation objective, de critères généraux pour l'obtention du droit d'asile et la volonté de maintenir une distinction entre réfugiés politiques et les autres. La politique libérale à l'égard des immigrés sert à mettre les immigrés sous une perpétuelle menace d'expulsion, à les fragiliser, à mettre des obstacles dans la voie de leur organisation et de leur entrée en lutte. Le libéralisme n’est pas contre les immigrés mais contre les droits des immigrés. Son problème, c’est de cultiver la fragilité et la précarité de l’immigration pour pouvoir mettre au service du capital une certaine force de travail taillable et corvéable à merci. Et cette action convient à merveille au patronat.

Dans son discours et ses accusations, le libéralisme passe insensiblement des immigrés aux «abuseurs», des abuseurs aux délinquants (les sans-papiers sont définis par la droite comme des délinquants économiques). Le libéralisme invente des populations criminogènes, une délinquance socio-ethnique, agitant les peurs et les angoisses des gens. Tout cela sert d’écran et de dérivatif. Les immigrés sont présentés comme producteurs d’insécurité, en concurrence avec les membres de la communauté nationale. En fait, le libéralisme construit une société répressive faite de sanctions, à tous propos – cela va de la dénonciation des enfants difficiles, actifs, pré-délinquants, du parcage du véhicule, à la poursuite des incivilités... Bref, une société castratrice.

C’est une politique d’État traditionnelle. Elle ouvre la voie à l’extension de politiques d’exception visant des catégories et des groupes sociaux entiers – par exemple, et dans un premier temps, les chômeurs, les minimexés, les sans-papiers, les sans domicile fixe, les gens du voyage, les précarisés en général. Leurs droits fondamentaux sont limités. Parfois, ils n’ont même plus de droits.

Dans les faits, la bourgeoisie, toute la bourgeoisie et pas seulement le courant libéral, mène cette guerre sociale. Cette lutte exacerbée et radicale des dominants contre les dominés (dont on peut dire avec certitude qu'elle dure depuis des siècles) ne vise pas seulement les plus pauvres, les plus précaires, les plus fragiles. Elle constitue une politique de précarisation et d’asservissement de tous les salariés, de toute la population. C'est très typiquement une politique de colonisation des populations au profit d'une classe mondiale.


 

Coexistence pacifique avec le libéralisme ?



Le projet du libéralisme est celui de toutes les classes dominantes. Certes, il y peut y avoir entre les diverses forces politiques de la bourgeoisie des nuances, des différences tactiques, des objectifs plus ou moins nuancés. Mais l’essentiel est que toute la droite économique, culturelle et politique est alignée sur le libéralisme pour mener la guerre sociale. Toutes les forces bourgeoises tirent parti de l’action du libéralisme pour faire avancer les intérêts généraux des classes dominantes, pour accroître l’exploitation.

La gauche de gouvernement et de paix sociale est directement associée à la politique menée contre les populations. Elle gouverne, elle tire aussi parti du système, elle met en œuvre les politiques dites néo-libérales ou ultra-libérales. Le social-libéralisme a abandonné les populations à leur sort et agit pour empêcher l’émergence de résistances et d'organisations de défense, de protection, de revendication et de combat.

Non, décidément non, la coexistence pacifique avec le libéralisme n'est pas possible; elle n'est pas souhaitable non plus.

De la gauche classique, politique ou syndicale, seule une petite partie tente de résister à la bourgeoisie. Le réformisme traditionnel est isolé et affaibli. La gauche qui se veut radicale, de résistance, voire révolutionnaire, doit cesser de privilégier le terrain institutionnel – en clair, ne pas collaborer avec le système et mettre ses forces dans la lutte sociale, dans la construction d’organisations pouvant appuyer les démarches de libération et d’émancipation sur tous les terrains, sur tous les objectifs, pour toutes les revendications de l’égalité sociale.



Oser lutter !

La lutte contre le racisme et la xénophobie, contre le soft-apartheid d’État, contre le déni des droits fondamentaux des populations est inséparable de la résistance à une bourgeoisie en guerre sociale. Les classes dominantes mènent une évidente politique de stigmatisation et de division des dominés. Cette politique vise à l’asservissement généralisé.

La lutte sociale contre l'asservissement et la lutte pour l’égalité sociale sont par excellence le terrain sur lequel se construit la communauté des dominés et des exploités. L’affirmation d’une alternative contre le capitalisme et le pouvoir des classes dominantes est une nécessité absolument indispensable et tout aussi absolument incontournable pour donner du sens aux luttes et aller de l'avant.

Cette alternative face au capitalisme, la résistance au libéralisme et au pouvoir ne peut se concevoir qu'au travers d'un combat pour la justice et la liberté, pour le socialisme et la liberté.



Ora e sempre : Resistenza !

Maintenant et toujours : Résistance !




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9 juin 2008 1 09 /06 /juin /2008 22:15

Alors, dit l'âne un peu ironique, tu en as encore fait une ?

Ben oui.

Et elle s'appelle comment ?, dit l'âne en écartant la mouche de sa queue.

En fait, la mouche n'est pas sur la queue de l'âne et c'est un peu normal, car ce serait fort inconfortable pour elle. Je veux dire pour la mouche, à moins qu'elle n'aime la balançoire. Mais dans ce cas, faut pouvoir s'accrocher. C'est bien connu de tous les âniers, les ânes balancent toujours leur queue et tant pis si ça vous dérange. C'est ainsi. N'allez pas croire que ça lui sert d'éventail; à l'endroit (enfin, si on peut dire) où elle se balance, l'usage de l'éventail n'est pas primordial. Mais faut chasser les mouches, surtout celles qui piquent, c'est-à-dire les taons. 

L'âne balance sa queue pour chasser le temps ?  Non, le taon.

Avec tout ce commentaire, dit l'âne en balançant sa queue derechef, tu ne m'as toujours pas dit comment s'appelle ta chanson, ni de quoi elle parle. C'est encore une parodie, je parie.

Ben oui.

Ben oui, quoi ? dit l'âne en agitant la queue encore un peu plus nerveusement.

Ben oui, c'est une parodie. Son titre est Mon carrousel à moi. Je t'explique de quoi il s'agit. Et d'abord, connais-tu Jean Constantin ? En as-tu déjà entendu parler ? C'était un gars assez drôle, fort sympathique et qui faisait de la musique (du piano) et des chansons.  Il a failli faire mourir mon grand-père.

Oui, il a voulu tuer ton grand-père ? Ou alors, il a failli l'écraser ?

Écoute l'âne, tu n'y es pas du tout. Jean Constantin a écrit et surtout chanté une des plus mémorables scies de toute l'histoire de la chanson. Et ce n'est pas peu de choses.

Quel rapport avec ton grand-père ? dit l'âne en se mordant la queue (ce que tout le monde ne peut pas faire...).

Ben, quand il entendait cette chanson, il devenait vert de rage. On aurait dit qu'il allait éclater. Faut dire qu'il travaillait dans l'atelier en écoutant la radio et que la chanson en question passait plusieurs fois par jour.  Évidemment, je l'entends encore. Alors voilà, la chanson – celle qui faisait hurler si fort mon grand-père – cette chanson-là raconte l'histoire d'un gars qui cherche ses pantoufles et qui hurle logiquement "Où sont passées mes pantoufles ?", comme il ne les trouve pas tout de suite, il repose la question  : "Où sont passées mes pantoufles ?" et comme il ne les trouve pas encore, il s'énerve et répète de plus en plus vite et de plus en plus fort, "Où sont passées mes pantoufles ? Où sont passées mes pantoufles ? Où sont passées mes pantoufles ?" , et ainsi de suite.  Mon grand-père lui aurait volontiers donné les siennes (de pantoufles) pour qu'il la ferme. C'est là que j'ai vu des pantoufles volantes. Elles finissaient leur vol dans le récepteur de radio pendant que ma grand-mère hurlait, voyons André, arrête, tu va casser la radio. C'est bien ce qu'il voulait faire.

Et tu aimes bien cette histoire de pantoufles, dit l'âne hilare. Moi, de toute façon, que veux-tu que je fasses de pantoufles?

Ben oui, j'aime bien cette histoire de pantoufles. Elle me rappelle mon grand-père. Il est mort d'une crise cardiaque.
Enfin, c'est grâce à lui que je suis passionné par les scies. Il adorait, si j'ose dire ainsi, du moins il réagissait très fort à Piaf, Mariano, Aznavour et plein d'autres dont je t'épargne la liste.

Oui mais,  Jean Constantin dans tout çà ? dit l'âne et baissant la tête pour cueillir une rose dans le parterre.

Jean Constantin était un fabriquant de scies. En plus des Pantoufles, il a chanté un Shah Persan dont le rêve était de voir pousser le gazon devant son papa, son palais en toutes saisons. J'entends encore mon grand-père hurler que ce shah-là vienne vivre ici au lieu de vivre là. Du gazon, je lui en ferai bouffer moi du gazon et à tous les repas encore bien.

 En fait, ce shah avait du gazole, mais pas de gazon, dit finement l'âne en souriant de ses dents jaunes. Mais ta chanson, ce n'est pas celle des Pantoufles, ni du Shah. Quelle est-elle alors ? Et était-elle elle aussi une scie ?

Ben oui. Une vraie scie, une scie à métaux, mieux, une scie circulaire. Elle tournait, tournait, tournait. Le titre de de la chanson  de Constantin était double, sans doute à force de tourner. On a le choix entre "Tu me fais tourner la tête" ou "Mon manège à moi".

Et toi, tu en as fait une parodie et tu l'as intitulée comment  cette chanson ? , susurre l'âne en bavant un peu sur les poils de son poitrail.

Ben tout simplement, Mon carrousel à moi. J'explique avant que tu ne poses la question. Oui, elle a un rapport avec les chômeurs et le chômage. En fait, quand un chômeur se présente devant le contrôleur (je dis ça en gros, c'est pas parfait au milipoil, mais c'est grosso modo ce qui se passe); donc, pour résumer, le chômeur se présente devant le contrôleur ( bof, certains disent facilitateur, mais ça c'est une blague, ce gars-là ne facilite certainement pas la vie du chômeur, bien au contraire et pour contrôler, il contrôle). Tu vois ça, le contrôleur assis dans son fauteuil - derrière lui, un mur; devant lui, un bureau et de l'autre côté, debout, la casquette entre les mains, le chômeur. Ils font leur petite affaire. Je veux dire un contrat et hop, le chômeur repart avec une menace de sanctions sur le râble. Mais surtout, c'est ce qui nous intéresse, il doit chercher de l'emploi (le voilà qui se mue en Indiana Jones et qui fonce à travers l'espace à la poursuite de l'emploi) et revenir se montrer un temps plus tard, pour une nouvelle séance de lévitation administrative. Et ainsi de suite, à l'infini.
C'est ce mouvement perpétuel qu'on appelle en jargon : le carrousel.

Bon, dit l'âne en ouvrant grands ses yeux luisants. Bon, et alors, ta chanson ?

Ben, ma chanson, elle raconte les rencontres du contrôleur et du chômeur; elle fait tourner le carrousel. Elle est chantée par le chômeur. Enfin, tu va voir.

 

 

 

Alors, dit l'âne un peu ironique, tu en as encore fait une ?

Ben oui.

Et elle s'appelle comment ?, dit l'âne en écartant la mouche de sa queue.

En fait, la mouche n'est pas sur la queue de l'âne et c'est un peu normal, car ce serait fort inconfortable pour elle. Je veux dire pour la mouche, à moins qu'elle n'aime la balançoire. Mais dans ce cas, faut pouvoir s'accrocher. C'est bien connu de tous les âniers, les ânes balancent toujours leur queue et tant pis si ça vous dérange. C'est ainsi. N'allez pas croire que ça lui sert d'éventail; à l'endroit (enfin, si on peut dire) où elle se balance, l'usage de l'éventail n'est pas primordial. Mais faut chasser les mouches, surtout celles qui piquent, c'est-à-dire les taons. 

L'âne balance sa queue pour chasser le temps ?  Non, le taon.

Avec tout ce commentaire, dit l'âne en balançant sa queue derechef, tu ne m'as toujours pas dit comment s'appelle ta chanson, ni de quoi elle parle. C'est encore une parodie, je parie.

Ben oui.

Ben oui, quoi ? dit l'âne en agitant la queue encore un peu plus nerveusement.

Ben oui, c'est une parodie. Son titre est Mon carrousel à moi. Je t'explique de quoi il s'agit. Et d'abord, connais-tu Jean Constantin ? En as-tu déjà entendu parler ? C'était un gars assez drôle, fort sympathique et qui faisait de la musique (du piano) et des chansons.  Il a failli faire mourir mon grand-père.

Oui, il a voulu tuer ton grand-père ? Ou alors, il a failli l'écraser ?

Écoute l'âne, tu n'y es pas du tout. Jean Constantin a écrit et surtout chanté une des plus mémorables scies de toute l'histoire de la chanson. Et ce n'est pas peu de choses.

Quel rapport avec ton grand-père ? dit l'âne en se mordant la queue (ce que tout le monde ne peut pas faire...).

Ben, quand il entendait cette chanson, il devenait vert de rage. On aurait dit qu'il allait éclater. Faut dire qu'il travaillait dans l'atelier en écoutant la radio et que la chanson en question passait plusieurs fois par jour.  Évidemment, je l'entends encore. Alors voilà, la chanson – celle qui faisait hurler si fort mon grand-père – cette chanson-là raconte l'histoire d'un gars qui cherche ses pantoufles et qui hurle logiquement "Où sont passées mes pantoufles ?", comme il ne les trouve pas tout de suite, il repose la question  : "Où sont passées mes pantoufles ?" et comme il ne les trouve pas encore, il s'énerve et répète de plus en plus vite et de plus en plus fort, "Où sont passées mes pantoufles ? Où sont passées mes pantoufles ? Où sont passées mes pantoufles ?" , et ainsi de suite.  Mon grand-père lui aurait volontiers donné les siennes (de pantoufles) pour qu'il la ferme. C'est là que j'ai vu des pantoufles volantes. Elles finissaient leur vol dans le récepteur de radio pendant que ma grand-mère hurlait, voyons André, arrête, tu va casser la radio. C'est bien ce qu'il voulait faire.

Et tu aimes bien cette histoire de pantoufles, dit l'âne hilare. Moi, de toute façon, que veux-tu que je fasses de pantoufles?

Ben oui, j'aime bien cette histoire de pantoufles. Elle me rappelle mon grand-père. Il est mort d'une crise cardiaque.
Enfin, c'est grâce à lui que je suis passionné par les scies. Il adorait, si j'ose dire ainsi, du moins il réagissait très fort à Piaf, Mariano, Aznavour et plein d'autres dont je t'épargne la liste.

Oui mais,  Jean Constantin dans tout çà ? dit l'âne et baissant la tête pour cueillir une rose dans le parterre.

Jean Constantin était un fabriquant de scies. En plus des Pantoufles, il a chanté un Shah Persan dont le rêve était de voir pousser le gazon devant son papa, son palais en toutes saisons. J'entends encore mon grand-père hurler que ce shah-là vienne vivre ici au lieu de vivre là. Du gazon, je lui en ferai bouffer moi du gazon et à tous les repas encore bien.

 En fait, ce shah avait du gazole, mais pas de gazon, dit finement l'âne en souriant de ses dents jaunes. Mais ta chanson, ce n'est pas celle des Pantoufles, ni du Shah. Quelle est-elle alors ? Et était-elle elle aussi une scie ?

Ben oui. Une vraie scie, une scie à métaux, mieux, une scie circulaire. Elle tournait, tournait, tournait. Le titre de de la chanson  de Constantin était double, sans doute à force de tourner. On a le choix entre "Tu me fais tourner la tête" ou "Mon manège à moi".

Et toi, tu en as fait une parodie et tu l'as intitulée comment  cette chanson ? , susurre l'âne en bavant un peu sur les poils de son poitrail.

Ben tout simplement, Mon carrousel à moi. J'explique avant que tu ne poses la question. Oui, elle a un rapport avec les chômeurs et le chômage. En fait, quand un chômeur se présente devant le contrôleur (je dis ça en gros, c'est pas parfait au milipoil, mais c'est grosso modo ce qui se passe); donc, pour résumer, le chômeur se présente devant le contrôleur ( bof, certains disent facilitateur, mais ça c'est une blague, ce gars-là ne facilite certainement pas la vie du chômeur, bien au contraire et pour contrôler, il contrôle). Tu vois ça, le contrôleur assis dans son fauteuil - derrière lui, un mur; devant lui, un bureau et de l'autre côté, debout, la casquette entre les mains, le chômeur. Ils font leur petite affaire. Je veux dire un contrat et hop, le chômeur repart avec une menace de sanctions sur le râble. Mais surtout, c'est ce qui nous intéresse, il doit chercher de l'emploi (le voilà qui se mue en Indiana Jones et qui fonce à travers l'espace à la poursuite de l'emploi) et revenir se montrer un temps plus tard, pour une nouvelle séance de lévitation administrative. Et ainsi de suite, à l'infini.
C'est ce mouvement perpétuel qu'on appelle en jargon : le carrousel.

Bon, dit l'âne en ouvrant grands ses yeux luisants. Bon, et alors, ta chanson ?

Ben, ma chanson, elle raconte les rencontres du contrôleur et du chômeur; elle fait tourner le carrousel. Elle est chantée par le chômeur. Enfin, tu va voir.





Mon carrousel à moi.


Tu me fais tourner la tête
Mon contrôleur à moi, c'est toi

Je suis toujours à la fête
Quand tu me fais chercher de l'emploi

Je ferais le tour du monde
Ça ne tournerait pas plus que ça
La terre n'est pas assez ronde
Pour attraper un emploi...

Ah! Ce qu'on est bien tous les deux
Quand on est ensemble nous deux
Quelle vie on a tous les deux
Quand on s'aime comme nous deux

On pourrait changer de planète
Je ne trouverais rien
Ce serait toujours ma fête
Et la terre n'y est pour rien

Ah oui! Parlons-en de l'emploi
Pour qui y a-t-il de l'emploi ?
Ma parole, y en a pas !!
Y a que toi qui dis qu'il y en a !

Mais moi et mes mômes
C'est toute la vie qu'on chôme
Et si y avait pas de vie, même,
Nous on chômerait quand même

Car...
Tu me fais tourner la tête
Mon carrousel à moi, c'est toi
Je suis toujours à la fête
Quand tu me fais chercher de l'emploi

Je ferais le tour du monde
Ça ne tournerait pas plus que ça
La terre n'est pas assez ronde...
Pour attraper un emploi...





Paroles: Jacques Constantin. Musique: Norbert Glanzberg - Mon Manège à moi.- 1958

Parodie : Marco Valdo M.I. - Mon Carrousel à moi - 2008


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8 juin 2008 7 08 /06 /juin /2008 20:53

Tant qu'à faire des parodies à partir de chansons populaires, que tout le monde fredonne, connaît, a déjà entendues, je disais qu'il fallait prendre des scies monumentales et s'il y en est une dans la chanson française, c'est celle-là. Devine laquelle ?

 

Oh, dit l'âne interrogatif, il y en a beaucoup. Je crois que la Piaf, ce petit moineau, devrait bien en avoir chantées quelques-unes. Et puis, pour moi, souviens-toi que je m'appelle Lucien, la chose est évidente et en plus, elle me plaît. Tu sais bien que pour échapper à mon destin et ne plus avoir cette apparence d'âne, je dois trouver des roses et même, je dois en manger. Donc, ce ne peut être que La Vie en Rose.

 

Oui, mais pour distinguer la parodie du premier coup d'œil, rien qu'au titre, tout en rappelant sans équivoque l'origine, il faut un titre très proche et très différent. T'as une idée ?

 

Bof, tu pourrais essayer La Vie en Noir, La Vie en Choses (un titre à la Pérec entre Les Choses et La Vie : mode d'emploi !), pourquoi pas d'ailleurs, La Vie : mode d'emploi ou L'Emploi, mode de vie, puisque tu chantes les aventures d'un chômeur ou d'une chômeuse.

 

Pas mal, tout ça. Mon emploi dans la vie, La vie et l'emploi. En fait, la chanson raconte une sorte de délire, de rêve éveillé d'un chômeur qui croit que le service mandaté pour l'aider à trouver de l'emploi va vraiment lui en trouver un et un vrai. Évidemment, c'est un songe, c'est pure imagination. C'est une supputation, une sorte de pari sur le futur. En fait, on lui promet de beaux jours, mais il ne les verra jamais. Ce contrôleur est un prometteur de beaux jours... De ce point de vue, il est exemplaire; c'est le contrôleur-type. De toute façon, le contrôleur n'a aucune illusion, lui; il sait qu'il y a des centaines de milliers de chômeurs et très peu d'emplois véritables. Le seul emploi qu'il pourrait vraiment offrir, c'est le sien. Mais évidemment, il ne le fera pas et on ne ferait qu'inverser les rôles. La machine à broyer continuerait à fonctionner.

 

Attends, dit l'âne en relevant ses oreilles, je crois que j'ai trouvé un titre pas mal. Que dirais-tu de Rêve en rose ? Ou de Futur en Rose ? Ou alors, L'Avenir en rose...

 

L'Avenir en Rose me plaît bien. On l'adopte. C'est un bon titre. Va donc pour L'Avenir en Rose. Au fait, tu crois que la Môme aurait eu quelque chose contre le fait qu'on utilise sa chanson pour défendre les chômeurs ?

 

A vrai dire, dit l'âne en se contorsionnant et en se grattant l'épaule gauche de son pied arrière, je crois bien qu'elle aurait été très contente, au contraire. Elle aussi a connu la misère. A mon avis, elle l'aurait même chantée. Rappelle-toi, elle chantait dans les cours au début, avant de devenir Edith Piaf.

 


 


 



L'avenir en rose

 



Des yeux qui font baisser les miens
Un rire qui se perd sur sa bouche
Voilà le portrait sans retouches
Du contrôleur qui me tient


Quand il me parle d'emploi
Il me parle tout bas
Je vois l'avenir en rose
Il me parle de beaux jours
De beaux jours tous les jours
Et ça me fait quelque chose
Il est entré dans mon cœur
Une part de bonheur
Dont je connais la cause
C'est un emploi pour moi toute la vie
Il me l'a dit, l'a juré, pour la vie
Et dès que je l'aperçois
Alors je sens en moi,
Mon cœur qui bat

Des offres d'emploi à n'en plus finir
Un beau matin, j'ai une place
Les ennuis, les chagrins s'effacent
Heureux, heureux à en mourir

Quand il me parle d'emploi
Il me parle tout bas
Je vois l'avenir en rose
Il me parle de beaux jours
De beaux jours tous les jours
Et ça me fait quelque chose
Il est entré dans mon cœur
Une part de bonheur
Dont je connais la cause
C'est un emploi pour moi toute la vie
Il me l'a dit, l'a juré, pour la vie
Et dès que je l'aperçois
Alors je sens en moi,
Mon cœur qui bat
Mon cœur qui bat

 

 

Edith Piaf – musique Louiguy – La Vie en Rose – 1946

Parodie : Marco Valdo M.I. - 2008

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7 juin 2008 6 07 /06 /juin /2008 21:18

En 1866, Théodore de Banville publie Le Verger du roi Louis; environ cent ans plus tard, Georges Brassens met ce texte en musique et le chante très admirablement.

L'affaire aurait pu s'arrêter là, mais quarante ans après Tonton Georges, Marco Valdo M.I. reprend texte, musique et chanson et crée ce qu'on appelle très exactement une parodie.

Entretemps, depuis Louis XI et son verger de pendus, la monarchie capétienne a disparu, mais dans un petit pays composite et voisin, une monarchie, achetée d'occasion aux Anglais, a été installée et de fil en aiguille, de père en fils, nous en sommes à Albert regnans. En clair, si nous ne sommes plus dans le Verger du roi Louis, nous sommes dans le pays du roi Albert. D'où, le titre de la chanson.

Et s'il n'y a plus de pendus (quoique... il arrive que des chômeurs se pendent; on le les y force pas, mais on les y pousse par la désespérance), il y a maintenant les exclus qu'on repousse dans la misère. Oh, pas seulement la misère matérielle, celle-là est encore la plus supportable; mais dans la misère morale, née de cet apartheid social qui les frappe sans bruit, sans mots, d'un pas feutré. Ceux qui en ont d'un côté, ceux qui n'en ont pas : au trou ! L'affaire n'est pas difficile à comprendre pour qui veut regarder les faits.

Tout simplement, les exclus désespèrent au pays du roi Albert.

On pardonnera donc à Marco Valdo M.I. d'avoir caviardé ce grand moment de la chanson française, mais cette misère-là, cette misère rampante et camouflée, il ne pouvait plus la supporter et il ne voulait plus la taire.

 

 

Le pays du roi Albert


Dans tout le pays répandue,

La chasse au chômeur fait des scores

Avec des milliers d'exclus

Que la télé abrutit et endort.

Pour de très éminents experts

de ce pays que le capital dévore,

la chasse aux chômeurs est un sport.

C'est le pays du roi Albert.


Tous ces chômeurs morfondus,

Roulant des pensers qu'on ignore,

Dans des tourbillons éperdus,

Voltigent, espérant encore.

Seul le néant les décore.

Voyez-les, les yeux à peine ouverts,

courir après l'emploi dès l'aurore

C'est le pays du roi Albert.


Ces exclus, par leur syndicat défendus,

Annoncent des exclus encore,

Tandis que la chasse les poursuit,

Ils fuient comme des météores.

La rosée en l'air s'évapore.

Un essaim de patrons réjouis

par dessus leur tête picore.

C'est le pays du roi Albert.


Prince, il est un bois que décore

Un tas d'exclus dans la misère

qui dansent la danse de mort.

C'est le pays du roi Albert.


Chanson de Georges Brassens (1960) – poème de Théodore de Banville (1866)

Parodie de Marco Valdo M.I. (2008)

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6 juin 2008 5 06 /06 /juin /2008 14:32




Ah , dit Marco Valdo M.I. à son camarade l'âne.


Ah, dit Félix, l'âne noir et blanc en levant sa grosse tête d'âne vers son camarade Marco Valdo M.I., que veux-tu dire par ah ?

C'est comme un soulagement, un soupir de contentement., répond Marco Valdo M.I. J'ai écrit les chansons qu' on m'avait demandées.

Des chansons, dit l'âne aux yeux luisant de curiosité, késako ? Quelles chansons ? T'en as déjà fait tout plein.

Oui, oui, c'est bien sûr, mais ici elles sont d'un genre particulier.

Qu'est-ce qu'elles ont de particulier ? s'étonne l'âne (mais pas vraiment, c'est juste par courtoisie, par politesse, par amitié...Bref, pour relancer la conversation).


En fait, ce sont des parodies. Il y en a (provisoirement ) quatre.


Mais, dit l'âne en balançant la queue d'un air perplexe, c'est quoi ces parodies et pourquoi tu fais des parodies, maintenant.


Au fait, tu as raison, mon camarade, dit Marco Valdo M.I. On croit toujours connaître la langue et voilà, on dit un mot. On pense que c'est le bon mot. Et puis, d'un coup, comme ça, on se rend compte que c'est venu comme çà, que c'est intuitif. On dit un mot, on est certain que ce doit être le bon. Par exemple, parodie. On se dit que c'est pour se moquer, une sorte de contrefaçon d'une chanson « sérieuse » et puis, on sent comme une ironie, comme une moquerie.


Oui, c'est ça que j'ai senti, dit l'âne en s'ébrouant. Mais, je me demande de qui ou de quoi, tu te moques. De la chanson de départ, de l'auteur de cette chanson, ou du genre de chanson.


C'est assez juste, répond Marco Valdo M.I.. Tu prends par exemple, une scie majuscule, genre La Vie en Rose (Quand elle me prend dans ses doigts, je me sens tout chose...) ou Le Chanteur de Mexico (Merci, coco...) et tout en conservant, la métrique, la structure, le rythme, la mélodie, tu en changes le sens. Ou alors, « Les trois cloches », dont tu peux évidemment et facilement, faire « Les trois moches », ou « Les trois broches »... Ou alors, le célébrissime « Petit c... de Ninon », si joli, si fragile, gai comme un papillon, le petit c... de Ninon. Bon, c'est vrai, dans la chanson, c'est le coeur de Ninon. Mais toi, tu avais compris autre chose, comme j'ai vu à ton air goguenard.


Alors, c'est ça que tu as fait, dit l'âne un peu trop rapidement. Des chansons pour te moquer des chansons, de ceux qui écrivent els chansons.


Non, pas vraiment, dit Marco Valdo M.I. Cette fois, j'ai fait des parodies, mais dans un autre sens du mot. Pour ce sens va voir, par exemple, le petit Robert.



J'y vais. Où est-ce qu'il habite ?, dit l'âne du tac au tac.


Non, le petit Robert, c'est un dictionnaire. Eh bien, le petit Robert (le grand aussi d'ailleurs, car il y a un plus grand Robert, en plusieurs volumes de grands formats) rappelle que le mot parodie a un deuxième sens, une deuxième signification. Vois-tu, mon camarade l'âne. Il dit très exactement : « parodie : couplet, strophe composés pour être chantés sur un air connu. » Où a-t-il bien pu aller chercher ça, Robert ? C'est tout simple, chez Émile Littré, un siècle auparavant. Au passage, note et rappelle-toi qu'il est toujours intéressant d'aller vérifier au dictionnaire. On y apprend plein de choses.



Donc, tu viens de faire des parodies et on dirait que ça te plaît, dit l'âne en souriant. Et tu as fait ça comme ça ?


J'en ai fait quatre. J'en ferai d'autres, sans doute, car quand on a commencé, qui sait quand on pourra s'arrêter. Mais, bien sûr, ce n'est pas vraiment un hasard. Je les ai volontairement construites sur des chansons existantes; c'est une tradition des chansonniers, tu sais, ces gens qui brocardent les puissants, les gouvernants. Il suffit de voir d'ailleurs La Vache à Mille Francs de Jean Poiret, que Brel, auteur de la chanson parodiée par Jean Poiret qui était, je te le rappelle, « La Valse à Mille Temps » (ces deux chansons ont connu leur heure de gloire et furent des scies industrielles) a reprise sur scène à l'Olympia en 1961. Bel hommage au chansonnier.


Et les autres ? , demande l'âne alléché comme un renard au pied de l'arbre à corbeaux.


Il y en quatre au total :

Une sur la Valse à Mille temps de Brel que j'ai intitulée La Valse des chômeurs

Une sur la Vache à Mille francs de Poiret que j'ai intitulée Le chômage rend fou

Une sur Les Amoureux du Havre de Léo Ferré que j'ai intitulée Je chôme, tu chômes...

Une sur Y a pas de soleil en Alaska d'Antoine que j'ai intitulée Y a plein de chômeurs en Wallonie.


Ah, dit l'âne un peu incrédule, tu crois que ça va aller.


Je ne sais pas trop, dit Marco Valdo M.I. Ce sont des versions qui peuvent évoluer. Mais enfin, c'est un premier pas. Bien entendu, j'en ferai sans doute d'autres. Mais il me faut du temps. J'ai un milliard de choses en chantier.


Mais qui va bien pouvoir chanter ça, dit l'âne tracassé. Si on les chante jamais.


Oui, c'est une vraie question, dit Marco Valdo M.I. En fait, je pense à des chanteurs populaires, ceux qui chantent dans les rues, ceux qui chantent dans les fêtes locales, dans les rassemblements, dans les manifestations... Je pense aussi aux chorales. Enfin, on verra bien.





Je chôme, tu chômes...

Chanson des chômeurs désœuvrés, de Marco Valdo M.I.

dérivée des Amoureux du Havre – chanson de Léo Ferré.



On mange mal,

On dort comme on peut.

On vit mal,

On survit comme on peut


Je chôme, tu chômes, on chômera

Jusqu'à la fin du monde

Puisque la terre est ronde

Mon ami t'en fais pas

 

Les chômeuses, les chômeurs, leurs enfants

Se fichent du capital et du rendement

Ils survivent sans salaire

Comme on survit sur la terre

 

Je chôme, tu chômes, on chômera

Jusqu'à la fin du monde

Puisque la terre est ronde

Mon ami t'en fais pas

 

Les chômeurs désœuvrés

Ont du temps pour rêver

Et des jours libérés

Pour pouvoir s'entraider


Je chôme, tu chômes, on chômera

Jusqu'à la fin du monde

Puisque la terre est ronde

Mon ami t'en fais pas

Mon ami t'en fais pas.


Les chômeurs désargentés

Ont du temps pour rêver

Et des jours libérés

Pour pouvoir s'entraider




La valse des chômeurs


Sur la chanson de Jacques Brel - La Valse à Mille temps – 1959

La Chanson des Chômeurs - Marco Valdo M.I. 2008


Au premier jour de chômage
Tout seul, tu t'ennuies déjà
Au premier jour de chômage
Tu es seul mais tu t'aperçois
Que l'Forem bat la mesure
Le Forem t'impose un contrat
Et l'Onem qui bat la mesure
Te murmure murmure tout bas


Un chômeur bien content
Qui s'offre encore le temps
Qui s'offre encore le temps
De s'offrir des détours
Du côté de l'amour
Comme c'est charmant


Un chômeur mécontent
C'est beaucoup moins dansant
C'est beaucoup moins dansant
Mais pas aussi charmant
Qu'un chômeur bien content
Un chômeur mécontent


Être chômeur à vingt ans
Être chômeur à vingt ans
C'est beaucoup plus troublant
Mais tout aussi déprimant
Qu'être chômeur à cinquante ans


Quand il est chômeur à vingt ans
Le chômeur a tout le temps
De devenir chômeur à soixante ans
Un chômeur ça s'entend
A chaque carrefour
Avec sa rage que l'amour
Rafraîchit au printemps


Un chômeur à mille temps
Un chômeur à mille temps
Un chômeur a mis le temps
De patienter vingt ans
Tout en espérant
Trouver un emploi gratifiant


Un chômeur à mille temps
Un chômeur à mille temps
Un chômeur a mis le temps
A dix mille fois le temps
Dix mille fois le temps
De bâtir un roman

Au deuxième temps du chômage

Vous êtes deux, le contrôleur et toi
Au deuxième temps du chômage
Vous comptez tous les deux une deux trois
Et l'Forem qui bat la mesure
l'Onem qui limite tes droits
Et l'Onem qui prend des mesures
Te fredonne fredonne déjà

On va t'exclure du chômage
Car tu ne trouves pas l'emploi
On va t'exclure du chômage
Car des emplois, il n'y en a pas


Et l'Onem qui prend des mesures
Laisse enfin éclater sa joie.
Et l'Onem qui prend des mesures
L'Onem sanctionne déjà


Mais un chômeur mécontent
Un chômeur ça s'entend
Un chômeur ça s'entend
A chaque carrefour
Avec sa rage que l'amour
Rafraîchit au printemps


Mais dix chômeurs mécontents
Cent chômeurs mécontents
Mille chômeurs mécontents
Cent mille chômeurs, ça s'entend
A chaque carrefour
Avec leur rage que l'amour
Rafraîchit au printemps


Cent mille chômeurs, ça s'entend
A chaque carrefour
Avec leur rage que l'amour
Rafraîchit au printemps
Cent mille chômeurs mécontents
C'est bien embarrassant
Ça peut devenir méchants
Et foutre en l'air le gouvernement

Cent mille chômeurs mécontents
Cent mille chômeurs mécontents
ça descend dans la rue en chantant
pour faire valser les gouvernements...


Lalalala....




Le chômage rend fou

Sur la chanson de Jean Poiret – La Vache à Mille francs , 1961

parodie de la chanson de Jacques Brel - La Valse à Mille temps - 1959

La Chanson des Chômeurs - Marco Valdo M.I. 2008




Au premier temps du chômage,
Tout seul dans la file, je suis là,
Au premier temps du chômage,
Y a l'employeur, y a l'interim et y a moi,
Et l'Onem qui bat la mesure,
La mesure de mon emploi,
Et l'Onem qui bat la mesure,
Mesure aussi mes fins de mois.

Un chômeur obéissant,
Comme ce serait charmant,
Comme ce serait charmant
Et beaucoup plus tentant
Qu'un chômeur récalcitrant,
Un chômeur obéissant,
Un chômeur obéissant,
Fait un Onem content,
Un Forem performant,
Un marché du travail attrayant,
Un chômeur obéissant,
Un chômeur obéissant,
Ce serait plus intéressant
Pour les patrons
Et pour les exportations
Qu'un chômeur résistant
Un chômeur obéissant…
Un chômeur obéissant,
Ce serait plus intéressant
Pour les patrons
Et pour les exportations
Qu'un chômeur résistant
Un chômeur obéissant…


Au deuxième temps du chômage,
C'est à peine si je vois de l'emploi
Au deuxième temps du chômage,,
Y a du monde entre l'emploi et moi.
Il y a le contrôleur qui passe la mesure,
Le facilitateur qui lui emboîte le pas,
Pendant que les ministres nous assurent
Que le coût de la vie n'augmente pas.

Un chômeur débutant,
En quittant Marbehan,
Devient chemin faisant
Comme par enchantement
Un chômeur consentant
On ne sait pas comment,
Est menacé de sanctions,
Accepte les formations
Et devient par conséquent
Un chômeur encore plus obéissant,
Un chômeur obéissant,
C'est bougrement tentant,
C'est bougrement tentant
Pour les patrons et les gouvernants
D'en faire innocemment
Un chômeur encore plus obéissant.
Un chômeur servile,
Un chômeur servile,
En sortant de la ville,
Pris dans un tourbillon
Devient pour les patrons
Par un calcul habile
Une proie très facile
Et pour le gouvernement
Un citoyen consentant.

Un chômeur sanctionné
Un chômeur sanctionné
Sans ses allocations
Est une excellente leçon
Pour les récalcitrants
Pour tous les travailleurs
Qui auraient des idées
De vouloir être augmentés.
Et comme disent les patrons,
Le coût moyen de l'heure
Est beaucoup trop élevé,
C'est une grave erreur,
Et pour le compenser,
Il faut de la productivité,
De la mobilité, de la flexibilité,
Et de la docilité.
Pour garantir tout çà,
Y faudrait licencier,
Faut plus de syndicats,
Faut plus de délégués.
Les salaires trop élevés
Faudrait les diminuer
Pour pouvoir augmenter
Le revenu des rentiers,
Il faut diminuer
Les salaires trop élevés, bien trop élevés
Pour pouvoir augmenter
Le revenu des rentiers,
Il faut diminuer
Les salaires trop élevés, bien trop élevés

Au dernier temps du chômage,
Dans la rue, le chômeur est là,
Au dernier temps du chômage,
Y a le chômeur et toujours pas d'emploi.
Et l'Etat, qui prend des mesures,
L'Etat qui mesure notre émoi,
Et l'Etat qui prend des mesures,
Pour exclure un peu plus chaque mois.

Oh le chômage ! Le chômage …
Oh le chômage nous rendra fous !
Oh le chômage ! Le chômage...
Ils se foutent vraiment de nous.





Y a plein de chômeurs en Wallonie


Trois Carolos à l'entrée du métro
Écoutaient le chômeur Polo
Qui racontait ses ennuis
Depuis que l'Onem le poursuit

Quand t'es chômeur à Charleroi
Tu peux courir après un emploi
Y pas d'emplois à Charleroi
Que des petits boulots, que de la tonte de gazon
Rien que de l'intérim et des trucs à la con.

Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum

Trois chômeurs liégeois assis sur banc
Se racontaient leurs emmerdements
Se disaient tous les ennuis
Qu'ils ont quand l'Onem les poursuit
 
Quand tu deviens chômeur à Liège
Tu tombes vraiment dans un piège
Car à Liège, y a pas d'emplois
Y en a pas plus qu'à Charleroi
Que des petits boulots, que de la tonte de gazon
Rien que de l'intérim et des trucs à la con.
 
Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum

Trois Louvièrois au bord du canal
Regardaient l'eau sans avoir le moral
Se disaient tous les ennuis
Qu'ils ont depuis que l'Onem les poursuit

Y a pas travail pour les Louvièrois
Tu peux toujours courir quand t'habites là
Y en pas plus qu'à Charleroi
Que des petits boulots, que de la tonte de gazon
Rien que de l'intérim et des trucs à la con.

Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum

Y a plein de chômeurs en Wallonie
Tu peux toujours aller en Flamanie
Y a pas d'emplois en Wallonie
Que des petits boulots, que de la tonte de gazon
Rien que de l'intérim et des trucs à la con.

Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum

Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum




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30 mai 2008 5 30 /05 /mai /2008 23:56

Comment ça va ? Comme un lundi... dit Alexandre.

Moi, ça va et toi. Moi, ça va et toi, ça va ? Copié, collé, grommellement répétitif, consensuel, stéréotypé, échangé à l'infini, jeté en pâture aux matinées grises.

La banalité du quotidien, l'ennui suinte par tous les pores du jour. Salut, bonjour, ça va et toi. Enfin, ça va. On n'écoute qu'à peine la réponse. On la connaît; elle ne peut être que celle-là, sous peine de complications et on n'aime pas les complications, les parenthèses et les explications. Vaut mieux s'en tenir à ça va.

Marco Valdo M.I., lui dit que ça va.

Pour lui, il va même très bien. Benissimo. On devrait le croire. Ce serait mieux.

Mais, en fait, personne ne le croit. Personne ne croit celui qui dit qu'il va « très, très bien ».

On sait très bien ce qu'il en est.

La réalité, c'est que la plupart du temps, pour beaucoup d'entre nous, ça ne va pas trop bien.

 

Bon, dit Marco Valdo M.I., pour les chômeurs comme moi, on comprend qu'il est impératif de répondre : ça va. Déjà qu'on est chômeur; si en plus, ça n'allait pas, si en plus, on avait le mauvais goût de se lamenter, de dire ses douleurs et ses tourments, de vouloir entrer dans les détails; la chose est socialement inacceptable.

A moins qu'entre chômeurs ? Allons donc, pensez-vous. C'est tout à fait hors de question.

Pour la plupart des gens, la cause est entendue. Le chômeur va très bien; il se complaît dans sa situation. Heureusement pour lui, et du coup, ça va encore mieux, on l'active, on le coache, en quelque sorte, comme un grand du monde. Si, si, on le cohache, on lui sert de l'anglais. Il doit aller mieux, il doit aller très bien. Il ne peut qu'aller bien dans cette armée du bonheur obligatoire; pas de défaitisme. Il faut être actif, le bonheur est à ce prix.

Mais prenons, comme dans la canzone léviane qui suit, le cas du travailleur ou de l'employé ou de l'agent de service public, de celui qui exerce sa fonction dans une entreprise ou une institution, bref de celui qui a du travail, qui bénéficie d'un emploi (oh, les beaux jours...) ; et bien, il devrait se sentir heureux dans ce paradis. Il est parmi les bienheureux, ceux qui ont décroché la timbale, ceux qui ont trouvé le Graal, ceux qui ont un emploi.

Comment ça va ? Comme un lundi...

Très bien, très très bien. Il est très bien, très, très bien. C'est ce qu'on dit, c'est ce qu'on entend. Toi, ça va. Vous, ça va. Comment allez-vous ? Très bien, benissimo.

Et puis, là subitement, on se dit que cette question banale pourrait bien être plus banale encore, plus terre à terre. A se demander de quoi on cause. Comment allez-vous ? Bien, j'espère. Moi aussi, j'espère pour vous que vous allez bien, sinon gare aux douleurs intestinales, gare aux occlusions. Comment ça va ?

Je n'ose imaginer les réponses : mollement, durement, lentement, ardument. Mais là, on est encore dans le vivant, dans le concret, dans l'humaine chaleur ; on a encore des tripes.

Mais pour certains, ceux qui voient l'humanité comme une machine productrice ou comme un immense service de travail obligatoire, l'homme, l'être humain disparaît, il ne reste que l'élément. Il en est de bons; c'est un bon élément, disent-ils. Un bon élément n'est déjà plus un bonhomme. Telle est l'histoire que raconte cette chanson léviane.

En arrière-plan, on entend la revendication léviane : « Non più cose, ma protagonisti » : « Plus des choses, mais des acteurs » (de notre vie, de la vie).


Au fait, comment ça va ? Vous, ça va encore ? Jusqu'à quand ?

 

 

 

Sto benissimo / Je vais très bien



Benissimo ! Benissimo !

Sto benissimo !

Dico io !


Très bien ! Très bien !

Je vais très bien !

Je le dis ! Je le dis !

Mais ce n’est pas vrai,

Ce n’est pas vrai !

Je vais mal, très mal !


Sono un elemento ! Un buon elemento !

Dicono loro.


Je suis un élément ! Un bon élément !

Qu’ils disent.

Je ne suis qu’un élément ! Un bon élément !


Invece di dire uomo

Di dire persona

Dicono elemento !

Pare che il mondo

sia una macchina

O uno termosifone

O uno termosifone


Au lieu de dire homme

De dire personne

Ils disent éléments !

Pour eux, le monde est

Une machine

Ou un radiateur

Ou un radiateur.


Invece d’aver uomini

Avremmo elementi

Elementi, documenti

Documenti, documenti

Non siamo più uomini

Documenti, documenti

Non siamo più uomini


Au lieu d'avoir des hommes

Nous aurons des éléments

Plus des hommes, des éléments

Eléments, documents,

Documents, documents,

Plus des hommes

Des documents,

Des documents,

Plus des hommes.


Io, li odio, li odio

Quei mostri !

Sono veramente mostri

Quegli elementi.

Sono veri mostri

Li odio, li odio.


Je les hais, je les hais

Ces monstres !

Sont vraiment des monstres

Ces éléments

Sont de vrais monstres

Je les hais ! Je les hais.


Benissimo ! Benissimo !

Sto benissimo !

Dico io !


Très bien ! Très bien !

Je vais très bien !

Je le dis ! Je le dis !




 

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