Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
8 juin 2008 7 08 /06 /juin /2008 20:53

Tant qu'à faire des parodies à partir de chansons populaires, que tout le monde fredonne, connaît, a déjà entendues, je disais qu'il fallait prendre des scies monumentales et s'il y en est une dans la chanson française, c'est celle-là. Devine laquelle ?

 

Oh, dit l'âne interrogatif, il y en a beaucoup. Je crois que la Piaf, ce petit moineau, devrait bien en avoir chantées quelques-unes. Et puis, pour moi, souviens-toi que je m'appelle Lucien, la chose est évidente et en plus, elle me plaît. Tu sais bien que pour échapper à mon destin et ne plus avoir cette apparence d'âne, je dois trouver des roses et même, je dois en manger. Donc, ce ne peut être que La Vie en Rose.

 

Oui, mais pour distinguer la parodie du premier coup d'œil, rien qu'au titre, tout en rappelant sans équivoque l'origine, il faut un titre très proche et très différent. T'as une idée ?

 

Bof, tu pourrais essayer La Vie en Noir, La Vie en Choses (un titre à la Pérec entre Les Choses et La Vie : mode d'emploi !), pourquoi pas d'ailleurs, La Vie : mode d'emploi ou L'Emploi, mode de vie, puisque tu chantes les aventures d'un chômeur ou d'une chômeuse.

 

Pas mal, tout ça. Mon emploi dans la vie, La vie et l'emploi. En fait, la chanson raconte une sorte de délire, de rêve éveillé d'un chômeur qui croit que le service mandaté pour l'aider à trouver de l'emploi va vraiment lui en trouver un et un vrai. Évidemment, c'est un songe, c'est pure imagination. C'est une supputation, une sorte de pari sur le futur. En fait, on lui promet de beaux jours, mais il ne les verra jamais. Ce contrôleur est un prometteur de beaux jours... De ce point de vue, il est exemplaire; c'est le contrôleur-type. De toute façon, le contrôleur n'a aucune illusion, lui; il sait qu'il y a des centaines de milliers de chômeurs et très peu d'emplois véritables. Le seul emploi qu'il pourrait vraiment offrir, c'est le sien. Mais évidemment, il ne le fera pas et on ne ferait qu'inverser les rôles. La machine à broyer continuerait à fonctionner.

 

Attends, dit l'âne en relevant ses oreilles, je crois que j'ai trouvé un titre pas mal. Que dirais-tu de Rêve en rose ? Ou de Futur en Rose ? Ou alors, L'Avenir en rose...

 

L'Avenir en Rose me plaît bien. On l'adopte. C'est un bon titre. Va donc pour L'Avenir en Rose. Au fait, tu crois que la Môme aurait eu quelque chose contre le fait qu'on utilise sa chanson pour défendre les chômeurs ?

 

A vrai dire, dit l'âne en se contorsionnant et en se grattant l'épaule gauche de son pied arrière, je crois bien qu'elle aurait été très contente, au contraire. Elle aussi a connu la misère. A mon avis, elle l'aurait même chantée. Rappelle-toi, elle chantait dans les cours au début, avant de devenir Edith Piaf.

 


 


 



L'avenir en rose

 



Des yeux qui font baisser les miens
Un rire qui se perd sur sa bouche
Voilà le portrait sans retouches
Du contrôleur qui me tient


Quand il me parle d'emploi
Il me parle tout bas
Je vois l'avenir en rose
Il me parle de beaux jours
De beaux jours tous les jours
Et ça me fait quelque chose
Il est entré dans mon cœur
Une part de bonheur
Dont je connais la cause
C'est un emploi pour moi toute la vie
Il me l'a dit, l'a juré, pour la vie
Et dès que je l'aperçois
Alors je sens en moi,
Mon cœur qui bat

Des offres d'emploi à n'en plus finir
Un beau matin, j'ai une place
Les ennuis, les chagrins s'effacent
Heureux, heureux à en mourir

Quand il me parle d'emploi
Il me parle tout bas
Je vois l'avenir en rose
Il me parle de beaux jours
De beaux jours tous les jours
Et ça me fait quelque chose
Il est entré dans mon cœur
Une part de bonheur
Dont je connais la cause
C'est un emploi pour moi toute la vie
Il me l'a dit, l'a juré, pour la vie
Et dès que je l'aperçois
Alors je sens en moi,
Mon cœur qui bat
Mon cœur qui bat

 

 

Edith Piaf – musique Louiguy – La Vie en Rose – 1946

Parodie : Marco Valdo M.I. - 2008

Partager cet article
Repost0
7 juin 2008 6 07 /06 /juin /2008 21:18

En 1866, Théodore de Banville publie Le Verger du roi Louis; environ cent ans plus tard, Georges Brassens met ce texte en musique et le chante très admirablement.

L'affaire aurait pu s'arrêter là, mais quarante ans après Tonton Georges, Marco Valdo M.I. reprend texte, musique et chanson et crée ce qu'on appelle très exactement une parodie.

Entretemps, depuis Louis XI et son verger de pendus, la monarchie capétienne a disparu, mais dans un petit pays composite et voisin, une monarchie, achetée d'occasion aux Anglais, a été installée et de fil en aiguille, de père en fils, nous en sommes à Albert regnans. En clair, si nous ne sommes plus dans le Verger du roi Louis, nous sommes dans le pays du roi Albert. D'où, le titre de la chanson.

Et s'il n'y a plus de pendus (quoique... il arrive que des chômeurs se pendent; on le les y force pas, mais on les y pousse par la désespérance), il y a maintenant les exclus qu'on repousse dans la misère. Oh, pas seulement la misère matérielle, celle-là est encore la plus supportable; mais dans la misère morale, née de cet apartheid social qui les frappe sans bruit, sans mots, d'un pas feutré. Ceux qui en ont d'un côté, ceux qui n'en ont pas : au trou ! L'affaire n'est pas difficile à comprendre pour qui veut regarder les faits.

Tout simplement, les exclus désespèrent au pays du roi Albert.

On pardonnera donc à Marco Valdo M.I. d'avoir caviardé ce grand moment de la chanson française, mais cette misère-là, cette misère rampante et camouflée, il ne pouvait plus la supporter et il ne voulait plus la taire.

 

 

Le pays du roi Albert


Dans tout le pays répandue,

La chasse au chômeur fait des scores

Avec des milliers d'exclus

Que la télé abrutit et endort.

Pour de très éminents experts

de ce pays que le capital dévore,

la chasse aux chômeurs est un sport.

C'est le pays du roi Albert.


Tous ces chômeurs morfondus,

Roulant des pensers qu'on ignore,

Dans des tourbillons éperdus,

Voltigent, espérant encore.

Seul le néant les décore.

Voyez-les, les yeux à peine ouverts,

courir après l'emploi dès l'aurore

C'est le pays du roi Albert.


Ces exclus, par leur syndicat défendus,

Annoncent des exclus encore,

Tandis que la chasse les poursuit,

Ils fuient comme des météores.

La rosée en l'air s'évapore.

Un essaim de patrons réjouis

par dessus leur tête picore.

C'est le pays du roi Albert.


Prince, il est un bois que décore

Un tas d'exclus dans la misère

qui dansent la danse de mort.

C'est le pays du roi Albert.


Chanson de Georges Brassens (1960) – poème de Théodore de Banville (1866)

Parodie de Marco Valdo M.I. (2008)

Partager cet article
Repost0
6 juin 2008 5 06 /06 /juin /2008 14:32




Ah , dit Marco Valdo M.I. à son camarade l'âne.


Ah, dit Félix, l'âne noir et blanc en levant sa grosse tête d'âne vers son camarade Marco Valdo M.I., que veux-tu dire par ah ?

C'est comme un soulagement, un soupir de contentement., répond Marco Valdo M.I. J'ai écrit les chansons qu' on m'avait demandées.

Des chansons, dit l'âne aux yeux luisant de curiosité, késako ? Quelles chansons ? T'en as déjà fait tout plein.

Oui, oui, c'est bien sûr, mais ici elles sont d'un genre particulier.

Qu'est-ce qu'elles ont de particulier ? s'étonne l'âne (mais pas vraiment, c'est juste par courtoisie, par politesse, par amitié...Bref, pour relancer la conversation).


En fait, ce sont des parodies. Il y en a (provisoirement ) quatre.


Mais, dit l'âne en balançant la queue d'un air perplexe, c'est quoi ces parodies et pourquoi tu fais des parodies, maintenant.


Au fait, tu as raison, mon camarade, dit Marco Valdo M.I. On croit toujours connaître la langue et voilà, on dit un mot. On pense que c'est le bon mot. Et puis, d'un coup, comme ça, on se rend compte que c'est venu comme çà, que c'est intuitif. On dit un mot, on est certain que ce doit être le bon. Par exemple, parodie. On se dit que c'est pour se moquer, une sorte de contrefaçon d'une chanson « sérieuse » et puis, on sent comme une ironie, comme une moquerie.


Oui, c'est ça que j'ai senti, dit l'âne en s'ébrouant. Mais, je me demande de qui ou de quoi, tu te moques. De la chanson de départ, de l'auteur de cette chanson, ou du genre de chanson.


C'est assez juste, répond Marco Valdo M.I.. Tu prends par exemple, une scie majuscule, genre La Vie en Rose (Quand elle me prend dans ses doigts, je me sens tout chose...) ou Le Chanteur de Mexico (Merci, coco...) et tout en conservant, la métrique, la structure, le rythme, la mélodie, tu en changes le sens. Ou alors, « Les trois cloches », dont tu peux évidemment et facilement, faire « Les trois moches », ou « Les trois broches »... Ou alors, le célébrissime « Petit c... de Ninon », si joli, si fragile, gai comme un papillon, le petit c... de Ninon. Bon, c'est vrai, dans la chanson, c'est le coeur de Ninon. Mais toi, tu avais compris autre chose, comme j'ai vu à ton air goguenard.


Alors, c'est ça que tu as fait, dit l'âne un peu trop rapidement. Des chansons pour te moquer des chansons, de ceux qui écrivent els chansons.


Non, pas vraiment, dit Marco Valdo M.I. Cette fois, j'ai fait des parodies, mais dans un autre sens du mot. Pour ce sens va voir, par exemple, le petit Robert.



J'y vais. Où est-ce qu'il habite ?, dit l'âne du tac au tac.


Non, le petit Robert, c'est un dictionnaire. Eh bien, le petit Robert (le grand aussi d'ailleurs, car il y a un plus grand Robert, en plusieurs volumes de grands formats) rappelle que le mot parodie a un deuxième sens, une deuxième signification. Vois-tu, mon camarade l'âne. Il dit très exactement : « parodie : couplet, strophe composés pour être chantés sur un air connu. » Où a-t-il bien pu aller chercher ça, Robert ? C'est tout simple, chez Émile Littré, un siècle auparavant. Au passage, note et rappelle-toi qu'il est toujours intéressant d'aller vérifier au dictionnaire. On y apprend plein de choses.



Donc, tu viens de faire des parodies et on dirait que ça te plaît, dit l'âne en souriant. Et tu as fait ça comme ça ?


J'en ai fait quatre. J'en ferai d'autres, sans doute, car quand on a commencé, qui sait quand on pourra s'arrêter. Mais, bien sûr, ce n'est pas vraiment un hasard. Je les ai volontairement construites sur des chansons existantes; c'est une tradition des chansonniers, tu sais, ces gens qui brocardent les puissants, les gouvernants. Il suffit de voir d'ailleurs La Vache à Mille Francs de Jean Poiret, que Brel, auteur de la chanson parodiée par Jean Poiret qui était, je te le rappelle, « La Valse à Mille Temps » (ces deux chansons ont connu leur heure de gloire et furent des scies industrielles) a reprise sur scène à l'Olympia en 1961. Bel hommage au chansonnier.


Et les autres ? , demande l'âne alléché comme un renard au pied de l'arbre à corbeaux.


Il y en quatre au total :

Une sur la Valse à Mille temps de Brel que j'ai intitulée La Valse des chômeurs

Une sur la Vache à Mille francs de Poiret que j'ai intitulée Le chômage rend fou

Une sur Les Amoureux du Havre de Léo Ferré que j'ai intitulée Je chôme, tu chômes...

Une sur Y a pas de soleil en Alaska d'Antoine que j'ai intitulée Y a plein de chômeurs en Wallonie.


Ah, dit l'âne un peu incrédule, tu crois que ça va aller.


Je ne sais pas trop, dit Marco Valdo M.I. Ce sont des versions qui peuvent évoluer. Mais enfin, c'est un premier pas. Bien entendu, j'en ferai sans doute d'autres. Mais il me faut du temps. J'ai un milliard de choses en chantier.


Mais qui va bien pouvoir chanter ça, dit l'âne tracassé. Si on les chante jamais.


Oui, c'est une vraie question, dit Marco Valdo M.I. En fait, je pense à des chanteurs populaires, ceux qui chantent dans les rues, ceux qui chantent dans les fêtes locales, dans les rassemblements, dans les manifestations... Je pense aussi aux chorales. Enfin, on verra bien.





Je chôme, tu chômes...

Chanson des chômeurs désœuvrés, de Marco Valdo M.I.

dérivée des Amoureux du Havre – chanson de Léo Ferré.



On mange mal,

On dort comme on peut.

On vit mal,

On survit comme on peut


Je chôme, tu chômes, on chômera

Jusqu'à la fin du monde

Puisque la terre est ronde

Mon ami t'en fais pas

 

Les chômeuses, les chômeurs, leurs enfants

Se fichent du capital et du rendement

Ils survivent sans salaire

Comme on survit sur la terre

 

Je chôme, tu chômes, on chômera

Jusqu'à la fin du monde

Puisque la terre est ronde

Mon ami t'en fais pas

 

Les chômeurs désœuvrés

Ont du temps pour rêver

Et des jours libérés

Pour pouvoir s'entraider


Je chôme, tu chômes, on chômera

Jusqu'à la fin du monde

Puisque la terre est ronde

Mon ami t'en fais pas

Mon ami t'en fais pas.


Les chômeurs désargentés

Ont du temps pour rêver

Et des jours libérés

Pour pouvoir s'entraider




La valse des chômeurs


Sur la chanson de Jacques Brel - La Valse à Mille temps – 1959

La Chanson des Chômeurs - Marco Valdo M.I. 2008


Au premier jour de chômage
Tout seul, tu t'ennuies déjà
Au premier jour de chômage
Tu es seul mais tu t'aperçois
Que l'Forem bat la mesure
Le Forem t'impose un contrat
Et l'Onem qui bat la mesure
Te murmure murmure tout bas


Un chômeur bien content
Qui s'offre encore le temps
Qui s'offre encore le temps
De s'offrir des détours
Du côté de l'amour
Comme c'est charmant


Un chômeur mécontent
C'est beaucoup moins dansant
C'est beaucoup moins dansant
Mais pas aussi charmant
Qu'un chômeur bien content
Un chômeur mécontent


Être chômeur à vingt ans
Être chômeur à vingt ans
C'est beaucoup plus troublant
Mais tout aussi déprimant
Qu'être chômeur à cinquante ans


Quand il est chômeur à vingt ans
Le chômeur a tout le temps
De devenir chômeur à soixante ans
Un chômeur ça s'entend
A chaque carrefour
Avec sa rage que l'amour
Rafraîchit au printemps


Un chômeur à mille temps
Un chômeur à mille temps
Un chômeur a mis le temps
De patienter vingt ans
Tout en espérant
Trouver un emploi gratifiant


Un chômeur à mille temps
Un chômeur à mille temps
Un chômeur a mis le temps
A dix mille fois le temps
Dix mille fois le temps
De bâtir un roman

Au deuxième temps du chômage

Vous êtes deux, le contrôleur et toi
Au deuxième temps du chômage
Vous comptez tous les deux une deux trois
Et l'Forem qui bat la mesure
l'Onem qui limite tes droits
Et l'Onem qui prend des mesures
Te fredonne fredonne déjà

On va t'exclure du chômage
Car tu ne trouves pas l'emploi
On va t'exclure du chômage
Car des emplois, il n'y en a pas


Et l'Onem qui prend des mesures
Laisse enfin éclater sa joie.
Et l'Onem qui prend des mesures
L'Onem sanctionne déjà


Mais un chômeur mécontent
Un chômeur ça s'entend
Un chômeur ça s'entend
A chaque carrefour
Avec sa rage que l'amour
Rafraîchit au printemps


Mais dix chômeurs mécontents
Cent chômeurs mécontents
Mille chômeurs mécontents
Cent mille chômeurs, ça s'entend
A chaque carrefour
Avec leur rage que l'amour
Rafraîchit au printemps


Cent mille chômeurs, ça s'entend
A chaque carrefour
Avec leur rage que l'amour
Rafraîchit au printemps
Cent mille chômeurs mécontents
C'est bien embarrassant
Ça peut devenir méchants
Et foutre en l'air le gouvernement

Cent mille chômeurs mécontents
Cent mille chômeurs mécontents
ça descend dans la rue en chantant
pour faire valser les gouvernements...


Lalalala....




Le chômage rend fou

Sur la chanson de Jean Poiret – La Vache à Mille francs , 1961

parodie de la chanson de Jacques Brel - La Valse à Mille temps - 1959

La Chanson des Chômeurs - Marco Valdo M.I. 2008




Au premier temps du chômage,
Tout seul dans la file, je suis là,
Au premier temps du chômage,
Y a l'employeur, y a l'interim et y a moi,
Et l'Onem qui bat la mesure,
La mesure de mon emploi,
Et l'Onem qui bat la mesure,
Mesure aussi mes fins de mois.

Un chômeur obéissant,
Comme ce serait charmant,
Comme ce serait charmant
Et beaucoup plus tentant
Qu'un chômeur récalcitrant,
Un chômeur obéissant,
Un chômeur obéissant,
Fait un Onem content,
Un Forem performant,
Un marché du travail attrayant,
Un chômeur obéissant,
Un chômeur obéissant,
Ce serait plus intéressant
Pour les patrons
Et pour les exportations
Qu'un chômeur résistant
Un chômeur obéissant…
Un chômeur obéissant,
Ce serait plus intéressant
Pour les patrons
Et pour les exportations
Qu'un chômeur résistant
Un chômeur obéissant…


Au deuxième temps du chômage,
C'est à peine si je vois de l'emploi
Au deuxième temps du chômage,,
Y a du monde entre l'emploi et moi.
Il y a le contrôleur qui passe la mesure,
Le facilitateur qui lui emboîte le pas,
Pendant que les ministres nous assurent
Que le coût de la vie n'augmente pas.

Un chômeur débutant,
En quittant Marbehan,
Devient chemin faisant
Comme par enchantement
Un chômeur consentant
On ne sait pas comment,
Est menacé de sanctions,
Accepte les formations
Et devient par conséquent
Un chômeur encore plus obéissant,
Un chômeur obéissant,
C'est bougrement tentant,
C'est bougrement tentant
Pour les patrons et les gouvernants
D'en faire innocemment
Un chômeur encore plus obéissant.
Un chômeur servile,
Un chômeur servile,
En sortant de la ville,
Pris dans un tourbillon
Devient pour les patrons
Par un calcul habile
Une proie très facile
Et pour le gouvernement
Un citoyen consentant.

Un chômeur sanctionné
Un chômeur sanctionné
Sans ses allocations
Est une excellente leçon
Pour les récalcitrants
Pour tous les travailleurs
Qui auraient des idées
De vouloir être augmentés.
Et comme disent les patrons,
Le coût moyen de l'heure
Est beaucoup trop élevé,
C'est une grave erreur,
Et pour le compenser,
Il faut de la productivité,
De la mobilité, de la flexibilité,
Et de la docilité.
Pour garantir tout çà,
Y faudrait licencier,
Faut plus de syndicats,
Faut plus de délégués.
Les salaires trop élevés
Faudrait les diminuer
Pour pouvoir augmenter
Le revenu des rentiers,
Il faut diminuer
Les salaires trop élevés, bien trop élevés
Pour pouvoir augmenter
Le revenu des rentiers,
Il faut diminuer
Les salaires trop élevés, bien trop élevés

Au dernier temps du chômage,
Dans la rue, le chômeur est là,
Au dernier temps du chômage,
Y a le chômeur et toujours pas d'emploi.
Et l'Etat, qui prend des mesures,
L'Etat qui mesure notre émoi,
Et l'Etat qui prend des mesures,
Pour exclure un peu plus chaque mois.

Oh le chômage ! Le chômage …
Oh le chômage nous rendra fous !
Oh le chômage ! Le chômage...
Ils se foutent vraiment de nous.





Y a plein de chômeurs en Wallonie


Trois Carolos à l'entrée du métro
Écoutaient le chômeur Polo
Qui racontait ses ennuis
Depuis que l'Onem le poursuit

Quand t'es chômeur à Charleroi
Tu peux courir après un emploi
Y pas d'emplois à Charleroi
Que des petits boulots, que de la tonte de gazon
Rien que de l'intérim et des trucs à la con.

Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum

Trois chômeurs liégeois assis sur banc
Se racontaient leurs emmerdements
Se disaient tous les ennuis
Qu'ils ont quand l'Onem les poursuit
 
Quand tu deviens chômeur à Liège
Tu tombes vraiment dans un piège
Car à Liège, y a pas d'emplois
Y en a pas plus qu'à Charleroi
Que des petits boulots, que de la tonte de gazon
Rien que de l'intérim et des trucs à la con.
 
Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum

Trois Louvièrois au bord du canal
Regardaient l'eau sans avoir le moral
Se disaient tous les ennuis
Qu'ils ont depuis que l'Onem les poursuit

Y a pas travail pour les Louvièrois
Tu peux toujours courir quand t'habites là
Y en pas plus qu'à Charleroi
Que des petits boulots, que de la tonte de gazon
Rien que de l'intérim et des trucs à la con.

Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum

Y a plein de chômeurs en Wallonie
Tu peux toujours aller en Flamanie
Y a pas d'emplois en Wallonie
Que des petits boulots, que de la tonte de gazon
Rien que de l'intérim et des trucs à la con.

Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum

Boumbadaboumbadaboum boumboum
Boumbadaboumbadaboum boumboum




Partager cet article
Repost0
3 juin 2008 2 03 /06 /juin /2008 22:35


Les voyages ont toujours titillé l'imagination, la curiosité; l'ailleurs, l'autre, le différent, l'étranger, l'étrange m'ont toujours fasciné, dit Marco Valdo M.I.

Moi aussi, dit l'âne, j'ai toujours aimé aller ailleurs, aller voir plus loin, rencontrer d'autres paysages, d'autres ânes, d'autres gens, d'autres herbes. J'ai toujours aimé voir le soleil se lever de l'autre côté de la montagne.

Moi aussi, dit l'âne. J'aime aller dans les villages, j'aime voir les pays inconnus et marcher sur des chemins ancestraux ou sur les routes qu'ont chantés les aèdes.

Fort bien, dit Marco Valdo M.I.

Que sais-tu de la Russie et des grands espaces de là-bas ? Que sais-tu de la nuit quand elle tombe sur la mer blanche ou sur la mer noire et de ce grand soleil d'été qui sur la plaine ne se couche presque plus ?

Rien , dit l'âne, mais j'aimerais bien.

Que sais-tu de tous ces gens qui vivent là-bas, demande l'âne.

Rien, dit Marco Valdo M.I.

Et toi que sais-tu de cet hiver dont la blancheur crève le regard ? Que sais-tu du givre infini ? Que sais-tu des reflets de lumière sur les eaux perdues ?

J'ai fait une chanson  (c'est encore une chanson léviane) pour chanter l'angoisse du voyageur devant le voyage. Écoute-la.



 

 

Voyage en Russie


 

 

Il fallait faire (me dit-on)

des programmes,

des plans pour mon voyage.

Ce n’était pas Moscou seule qui était devant moi,

mais toute la Russie,

avec ses républiques, ses territoires,

ses espaces infinis d’Europe et d’Asie,

du nord et du sud, de l’occident et de l’orient,

et je pouvais aller partout.

 

Par quelle partie commencer ?

Comment laisser de côté une chose plutôt qu’une autre ?

 

Je n’aime pas les schémas et les programmes

la réalité est si vivante qu’elle nous mène par la main

et se dévoile partout.

 

Choisir, faire une liste ?

Je préférais déambuler dans les rues

Connaître les hommes.

Un mois, c’est trop peu,

Pour les aspects infinis d’un pays immense.

 

Par quelle partie commencer ?

Comment laisser de côté une chose plutôt qu’une autre ?

 

 

Je choisis tout : les maisons, les usines, les écoles,

les paysans, les écrivains, les artistes,

les hôpitaux, les instituts scientifiques,

les journaux, les théâtres, le cinématographe,

le sport,

les villes et villages, les grands et les petits.

Des années de voyage et de séjour !

 

Par quelle partie commencer ?

Comment laisser de côté une chose plutôt qu’une autre ?

 

 

Mais cordial, limpide, gentil, affectueux, un peu sourd,

avec une voix profonde aux résonances des grands Russes,

interrompue de tonnants éclats de rire,

l’ami qui m’écoutait ne s’étonnait pas.

 

Par quelle partie commencer ?

Comment laisser de côté une chose plutôt qu’une autre ?

 


 

Partager cet article
Repost0
2 juin 2008 1 02 /06 /juin /2008 20:49

 

Ciribiribin est un beau titre pour une chanson et pour une chanson léviane, plus encore.

Est-ce du piémontais, que cette étrange langue ? Ciribiribin. Il faut le supposer. Ciribiribin. Quelle autre langue aurait pu bercer Carlo Levi enfant ? La Turin du début du siècle dernier. Air d'enfance, chansonnette nostalgique. Ciribiribin. C'était, il y a un siècle, avec cette foutue impression que c'était hier.

En compagnie de Carlo Levi, on a toujours l'impression d'y être, que si ce n'était maintenant, c'était tout proche, qu'il suffit de tourner le coin, qu'il suffit d'ouvrir la porte, qu'il suffit de fredonner. Ciribiribin.

Ciribiribin. Là, on est à Moscou, dans un grand hôtel. On y est vers 1960. Une époque révolue, certes; oubliée pour beaucoup et d'un coup, terriblement présente, et le retour fulgurant de cette Espagne républicaine qui fit la grandeur de l'Europe avant que les démocraties ne se couchent devant les délires les plus abjects. Benito, Adolf, Antonio, Francisco, bourrels absurdes.

Ciribiribin, on boit la vodka au milieu des peuples oubliés: Ouzbèkes, Afghans; Irakiens, Libanais. Moi, dit Marco Valdo M.I à l'âne, dans la chasse aux sorcières, je prends toujours le parti des sorcières.

Ciribiribin. Benito, Adolf, Antonio, Francisco. Nous n'avons pas oublié la guerre que l'on fit au peuple catalan qui fut si près de réussir une révolution majeure et libertaire, la guerre que l'on fit aux Basques – non dimenticare Guernica, ne pas oublier Guernica, la guerre que l'on fit aux Madrilènes et aux Castillans, aux Galiciens, la guerre plus feutrée, plus étouffée que l'on fit aux voisins portugais.

Et celle que l'implanté au sourire javellisé fait actuellement aux Italiens, et celle que l'on fait aujourd'hui aux pauvres du monde entier... Ciribiribin.


Nous voici revenus au temps des chansonnettes. Ciribiribin.
Buvons une vodka à Moscou avec Carlo Levi et Ciribiribin...


Che bel bôchin

 

Ciribiribin

 

Ciribiribin, che bel facin

Che bel bôchin

Che bel nasin…

 

entourés d’Ousbèkes, de Tartares,

de Mongols, de Georgiens,

de Chinois, de Hongrois,

d’Azerbaïdjanais, de Kirghizes,

nous affrontâmes notre vodka.

 

Ciribiribin, che bel facin

Che bel bôchin

Che bel nasin…

 

Le garçon était un petit brun,

à la peau pâle couleur d’olive :

un Espagnol, un réfugié,

Arrivé à la fin de la guerre civile.

Il raconta sa vie, ses années de guerre,

les sept blessures reçues sur les différents fronts de bataille,

sa femme qui dut fuir encore enfant, avec l’armée républicaine,

la vie en émigration.

 

Ciribiribin, che bel facin

Che bel bôchin

Che bel nasin…

 

Barcelone, avant la guerre,

et Zamora, le grand Zamora, le fameux Zamora,

ce gardien merveilleux

qui trahit Barcelone pour Madrid,

puni par un paladin catalan,

qui en shootant un ballon si terrible

cassa les mains de Zamora.

 

Ciribiribin, che bel facin

Che bel bôchin

Che bel nasin…

 

Ces choses s’étaient passées au temps des chansonnettes.

Peu après, un vent de tempête

avait poussé les hommes

aux plus impensables héroïsmes.

Mais la vie d’un homme,

d’un simple serveur espagnol,

comme la nôtre,

englobe toutes choses

et une infinité d’autres également

et un même ciel les couvre

de ses étoiles si lointaines.

 

Ciribiribin, che bel facin

Che bel bôchin

Che bel nasin…

 

Partager cet article
Repost0
30 mai 2008 5 30 /05 /mai /2008 23:56

Comment ça va ? Comme un lundi... dit Alexandre.

Moi, ça va et toi. Moi, ça va et toi, ça va ? Copié, collé, grommellement répétitif, consensuel, stéréotypé, échangé à l'infini, jeté en pâture aux matinées grises.

La banalité du quotidien, l'ennui suinte par tous les pores du jour. Salut, bonjour, ça va et toi. Enfin, ça va. On n'écoute qu'à peine la réponse. On la connaît; elle ne peut être que celle-là, sous peine de complications et on n'aime pas les complications, les parenthèses et les explications. Vaut mieux s'en tenir à ça va.

Marco Valdo M.I., lui dit que ça va.

Pour lui, il va même très bien. Benissimo. On devrait le croire. Ce serait mieux.

Mais, en fait, personne ne le croit. Personne ne croit celui qui dit qu'il va « très, très bien ».

On sait très bien ce qu'il en est.

La réalité, c'est que la plupart du temps, pour beaucoup d'entre nous, ça ne va pas trop bien.

 

Bon, dit Marco Valdo M.I., pour les chômeurs comme moi, on comprend qu'il est impératif de répondre : ça va. Déjà qu'on est chômeur; si en plus, ça n'allait pas, si en plus, on avait le mauvais goût de se lamenter, de dire ses douleurs et ses tourments, de vouloir entrer dans les détails; la chose est socialement inacceptable.

A moins qu'entre chômeurs ? Allons donc, pensez-vous. C'est tout à fait hors de question.

Pour la plupart des gens, la cause est entendue. Le chômeur va très bien; il se complaît dans sa situation. Heureusement pour lui, et du coup, ça va encore mieux, on l'active, on le coache, en quelque sorte, comme un grand du monde. Si, si, on le cohache, on lui sert de l'anglais. Il doit aller mieux, il doit aller très bien. Il ne peut qu'aller bien dans cette armée du bonheur obligatoire; pas de défaitisme. Il faut être actif, le bonheur est à ce prix.

Mais prenons, comme dans la canzone léviane qui suit, le cas du travailleur ou de l'employé ou de l'agent de service public, de celui qui exerce sa fonction dans une entreprise ou une institution, bref de celui qui a du travail, qui bénéficie d'un emploi (oh, les beaux jours...) ; et bien, il devrait se sentir heureux dans ce paradis. Il est parmi les bienheureux, ceux qui ont décroché la timbale, ceux qui ont trouvé le Graal, ceux qui ont un emploi.

Comment ça va ? Comme un lundi...

Très bien, très très bien. Il est très bien, très, très bien. C'est ce qu'on dit, c'est ce qu'on entend. Toi, ça va. Vous, ça va. Comment allez-vous ? Très bien, benissimo.

Et puis, là subitement, on se dit que cette question banale pourrait bien être plus banale encore, plus terre à terre. A se demander de quoi on cause. Comment allez-vous ? Bien, j'espère. Moi aussi, j'espère pour vous que vous allez bien, sinon gare aux douleurs intestinales, gare aux occlusions. Comment ça va ?

Je n'ose imaginer les réponses : mollement, durement, lentement, ardument. Mais là, on est encore dans le vivant, dans le concret, dans l'humaine chaleur ; on a encore des tripes.

Mais pour certains, ceux qui voient l'humanité comme une machine productrice ou comme un immense service de travail obligatoire, l'homme, l'être humain disparaît, il ne reste que l'élément. Il en est de bons; c'est un bon élément, disent-ils. Un bon élément n'est déjà plus un bonhomme. Telle est l'histoire que raconte cette chanson léviane.

En arrière-plan, on entend la revendication léviane : « Non più cose, ma protagonisti » : « Plus des choses, mais des acteurs » (de notre vie, de la vie).


Au fait, comment ça va ? Vous, ça va encore ? Jusqu'à quand ?

 

 

 

Sto benissimo / Je vais très bien



Benissimo ! Benissimo !

Sto benissimo !

Dico io !


Très bien ! Très bien !

Je vais très bien !

Je le dis ! Je le dis !

Mais ce n’est pas vrai,

Ce n’est pas vrai !

Je vais mal, très mal !


Sono un elemento ! Un buon elemento !

Dicono loro.


Je suis un élément ! Un bon élément !

Qu’ils disent.

Je ne suis qu’un élément ! Un bon élément !


Invece di dire uomo

Di dire persona

Dicono elemento !

Pare che il mondo

sia una macchina

O uno termosifone

O uno termosifone


Au lieu de dire homme

De dire personne

Ils disent éléments !

Pour eux, le monde est

Une machine

Ou un radiateur

Ou un radiateur.


Invece d’aver uomini

Avremmo elementi

Elementi, documenti

Documenti, documenti

Non siamo più uomini

Documenti, documenti

Non siamo più uomini


Au lieu d'avoir des hommes

Nous aurons des éléments

Plus des hommes, des éléments

Eléments, documents,

Documents, documents,

Plus des hommes

Des documents,

Des documents,

Plus des hommes.


Io, li odio, li odio

Quei mostri !

Sono veramente mostri

Quegli elementi.

Sono veri mostri

Li odio, li odio.


Je les hais, je les hais

Ces monstres !

Sont vraiment des monstres

Ces éléments

Sont de vrais monstres

Je les hais ! Je les hais.


Benissimo ! Benissimo !

Sto benissimo !

Dico io !


Très bien ! Très bien !

Je vais très bien !

Je le dis ! Je le dis !




 

Partager cet article
Repost0
29 mai 2008 4 29 /05 /mai /2008 18:08

Un jour de colère, Marco Valdo M.I. a lancé son cri de guerre, son péan, sa devise, son destin :

« Io sono un'uomo poetico ».


Sans trop savoir la portée de cette singulière affirmation.

Qui ose encore aujourd'hui s'affirmer « poétique » et y voir le plus haut destin de l'humaine vie ? Qui ose se vouloir encore jongleur de mots ? Que pourrait-il en tirer ? Il n'y a rien à gagner à pareils contorsions, sauf peut-être, sauf sans doute de se rencontrer soi-même.

Sauf de faire des choses poétiques comme un cordonnier fait des chaussures; mais la poésie comme la chaussure de cordonnier est devenue une chose désuète. Peut-on vivre de la chaussure artisanale ? J'en doute. Du plaisir de faire des chaussures à la main, certainement.

Il en va de même pour le faiseur de poèmes, lequel à l'évidence s'apparente au faiseur de rêves, faiseur de nuages et autres saltimbanques (qui saute au dessus du banc ou qui fait sauter les banques ? On ne sait trop que choisir comme destin...).


Aujourd'hui, Marco Valdo M.I. dans un tour de passe-passe, dans un geste de prestidigitation, a décidé de faire disparaître l'Italie, il a pris la route de l'exil. Le retour de l'implanté au sourire de bronze et les premières ratonnades l'y ont vivement incité.

Rappel de "Non Mollare" : ne jamais collaborer avec ceux-là, fascistes, néo-fascistes, post-fascistes, simili-fascistes et apparentés.

On y reviendra.

Retour donc à Carlo Levi et faisons joyeusement disparaître, ne fût-ce qu'un instant, ne fût-ce que fortuitement, cette Italie de la honte, de l'ambition, de l'arrogance, de l'avidité et de l'asphyxie (morale, psychique, s'entend) ... Rien que pour respirer un peu.

Marco Valdo M.I. raconte la disparition de l'Italie. Qu'on ne s'en effraie pas; ce n'est pas un poseur de bombes, il n'a aucune vocation à réduire la planète en poussière ou à escamoter dans une grande explosion attentatoire et pour tout dire, terroriste tout un pays d'un coup, sans compter ses habitants.

Certes, la disparition d'un monde est toujours préoccupante. On ne s'est toujours pas remis de la disparition de l'Atlantide et personne ne sait d'ailleurs où elle a sombré, si tel fut son destin. Au fait, on n'en sait rien.

N'est-ce pas le destin qui attend les îles britanniques ? ou d'autres régions d'Europe que la fonte des pôles et la montée des mers pourraient engloutir. Même si les cloches des villes englouties, même si les palais des cités antiques perdus sous les mers ou noyés dans des lacs enchantent bien des songes, on veut croire que tout cela n'est pas pour demain.

Il est bien des mystères et la disparition est toujours intrigante.

Mais enfin, il n'est nullement question de tout cela et cette introduction catastrophique est seulement le prétexte à une nouvelle canzone léviane qui raconte la disparition de l'Italie, celle que connaît le voyageur moderne quittant Rome en soirée et remontant vers le Nord.

En fait, cette canzone léviane – comme toutes ses sœurs – a pour seul but de susciter une attention, de donner un écho à ce qui se trouve – quand on cherche – dans l'œuvre de Carlo Levi. D'où son nom de « léviane ».

Carlo Levi était un grand voyageur et d'exils en reportages, de navettes entre Turin et Aliano, entre Rome et Alassio, il n'arrêtait pas de partir et de voir disparaître les choses à la tombée de la nuit.

Cette sensation, ce moment, cet instant fugace, cette disparition de Rome d'abord, de l'Italie ensuite, Marco Valdo M.I. lui aussi l'a ressentie et reprenant – en partie les mots de Carlo Levi, il a noté, comme sur une partition, la musique particulière de cet effacement dans la nuit.

 

 

La disparition de l'Italie


L'avion

immobile,

vibre et frémit,

court sur la piste,

et le voilà dans le ciel.

Ciampino, la via Appia,

les tombes sont en dessous de nous.

Plus légers que l'air,

liés aux sièges, sans pensées.

Dans le crépuscule de la nuit,

la campagne romaine,

de lointaines lampes rouges,

les lumières rouges de l'aile,

on entre dans le ciel rouge

Coucher de soleil,

nuages allongés, fumées, vapeurs,

une côte indéterminée,

une ombre profonde et bleue,

c'est peut-être la mer.

Le rouge du ciel occidental jaunit

se voile de marron et de gris

le ciel se fait jaune et vert,

mêlé d'ombres marines,

toujours plus sombre,

et dans cette ombre,

l'Italie,

disparaît en dessous de nous.



 

Partager cet article
Repost0
28 mai 2008 3 28 /05 /mai /2008 17:24





On ne sait trop pourquoi on écrit, pourquoi on dit ceci ou cela, pourquoi comme une illumination une idée, une image passe par la plume, par la tête, par les doigts. Les textes naissent comme ça; de leur propre nécessité. Les miens, du moins.
Ceux des poètes aussi, me semble-t-il.
Ce sont au sens propre des compositions de mots, comme il existe des compositions de notes. Les compositions de mots ont ceci de particulier que l'instrument pour les jouer est silencieux : c'est la voix humaine intérieure.
On se parle, on se dit les choses, on se lit les textes, on est son propre aède, son propre récitant.
Ce n'est assurément pas le destin de tous les textes. Certains sont mûrement réfléchis; leurs auteurs, comme on dit, savent où ils veulent aller, à défaut de savoir où ils vont.  Il s'agit de monter des phrases selon un plan dûment établi et de tout joindre en une sorte de mécano mental. Ce sont des phrases instruments, des mots instrumentalisés.  C'est utile, c'est pratique et revigorant. C'est constructif. Il y a un but, il y a un objectif.  C'est le texte mercenaire, le mot devenu matériau de construction intellectuelle, quand ce n'est pas réglementaire ou administrative. Pire, parfois, il est réduit à une fonction mercantile.
Passons.
Ce n'est assurément pas de ça qu'il est question ici. Très exactement : pas de ça, ici !
Donc, je suis tombé sur un texte de chanson  - une chose bien futile la chanson - dont le titre m'a mis en arrêt comme un épagneul breton devant un faisan. Carne umana per colazione. On peut dire qu'il a de la gueule, ce titre-là.
Titre italien, texte italien, auteur italien, chanson italienne.
Je me suis dit, il faut nourrir le blog.

Ici, une parenthèse, à propos de ce genre de publication qu'est le blog.
C'est simple, un blog, c'est un ogre, c'est un tamagoshi : si vous ne l'alimentez pas de chair fraîche très régulièrement, il meurt. C'est comme un animal domestique, comme un humain - même dans les pires camps de concentration, ils devaient bien nourrir leurs internés. Pas beaucoup, pas de façon très convaincante et comme dit ce vieux prisonnier d'Auschwitz (vieux aujourd'hui; très jeune à l'époque), dont je traduis les mémoires, ils n'étaient nourris que dans la mesure où on avait besoin d'eux comme esclaves. Primo Levi ne dit pas autre chose.
Ne croyez pas que je m'écarte du sujet.
A propos de l'Italie et de Rome et de ce passé tumultueux, le nouveau Maire de Rome vient d'annoncer son intention de faire consacrer une rue à ce bon vieux Giorgio Almirante, fondateur et ancien secrétaire du MSI, Mouvement Social Italien, résurgence et continuité du Parti national Fasciste, qui  intronisa Gianfranco Fini pour lui succéder.
En avril 1944, alors chef de cabinet du ministre de la République fasciste de Salò, Mezzasoma, l'ineffable Almirante signa un texte intimant l'ordre aux soldats italiens de se rendre aux Allemands et terminait son texte par une phrase éminemment pratique : "Ceux qui ne se présenteront pas seront considérés comme hors-la-loi et fusillés dans le dos."  Francis Blanche ajoutait  : " Vous serez fusillés Sévèrement !"
Dans le dos, ce doit être plus infamant, semble-t-il. On peut se demander dans quelle cervelle sadique pareille idée peut avoir prospéré, pour ne pas dire, macéré.
Pourquoi pas tant qu'il y est, le Maire de Rome ne consacre pas le Colisée ou la place Saint-Pierre à Benito Mussolini ou mieux encore, une place « Benito et Adolfo ».

Cela dit, le monde évolue et nous avançons à grands pas.
Pour en revenir au blog et au texte de ce jour, à cette chanson au titre curieux, j'en dirai simplement maintenant qu'elle est l'œuvre de Francesco De Gregori, né à Rome, en 1951. J'en dirai plus une autre fois.
Place à la chanson.

Chair humaine pour déjeuner


Hey,

On ne devrait probablement pas le faire,

Cependant, on le fait déjà

Correctement, politiquement

et puis, sans doute, ça deviendra

quelque chose qui divertira les gens,

un nouveau genre de télévision,

un loisir intelligent,

un championnat de liposuccion.



Hey,

C'est une nouvelle spécialité :

Chair humaine pour déjeuner !

Chair humaine pour déjeuner !


Hey,

Tu ne dois pas te tracasser,

prends la chose avec tranquillité.

Il est garanti que ça ne fait pas mal,

mais ce n'en est pas moins une nouveauté !

C'est l'eau qui s'alourdit,

la photocopie d'une explosion,

de la chaux vive dans un restaurant,

ou une fumée dans une gare.


Hey,

Ne sens-tu pas ? Ils cuisinent déjà

De la chair humaine pour déjeuner !


Hey,

Il y a une lumière au milieu du ciel

Juste là où tu regardes.

Il y avait une fois un monde entier

et à présent, il n'existe plus,

pourtant il existait vraiment

et il a fini on ne sait comment;

il n'en est quasi rien resté

à part l'écho d'une radiation.

Hey,

D'ici à l'éternité :

Chair humaine pour déjeuner.

Hey,

Y a quelque chose dans le journal,

Ils en font la publicité.

Tu ne dois la laisser échapper :

C'est un éclat de modernité,

C'est un héros de l'autre guerre,

enfermé dans une prison.

Sera-t-il pendu demain matin

ou libéré sous caution?

Hey,

Quelqu'un a déjà parié :

Chair humaine pour déjeuner !


Francesco De Gregori – Carne umana per colazione. 2008

Version française : Chair humaine pour déjeuner - Marco Valdo M.I.

Partager cet article
Repost0
24 mai 2008 6 24 /05 /mai /2008 08:56

Fabrizio De Andrè avait une tendresse particulière pour les femmes - on le comprend. Il avait aussi une manière d'en parler et de défendre celles que la pudibonderie faisait profession de mépriser et de chasser. Brassens avait dit de bien belles choses de Margoton et de son petit chat; De Andrè raconte - à sa manière - une histoire semblable où la jalousie et la cuistrerie reçoivent leur lot de verges. Une scène, toute une aventure, tout un monde en quelques couplets, en quelques vers. Il y a là derrière tout un cinéma, une manière assez proche de la "comédie à l'italienne", un conte à moralité. Car au fond, ce qui tend l'arc de De Andrè, c'est une certaine conception de la justice et de la morale et cette idée toute de liberté vêtue qu'une manière en vaut bien une autre, que chacun devrait pouvoir vivre sa vie sans subir les fourches villageoises et bigotes et somme toute, que l'amour est un ingrédient essentiel d'un quotidien arrosé de jus de bonheur et que Marie la Vierge et Bouche de Rose, l'amoureuse, font ensemble la procession.
Que celui qui n'a jamais baisé une bouche, jette la première pierre !


Bouche de Rose.



On l'appelait Bouche de Rose
Elle mettait l'amour au dessus de tout
On l'appelait Bouche de rose
Elle mettait l'amour par dessus tout

Dès son arrivée à la gare
Du village de Saint Hilaire
Tous s'aperçurent d'un regard
Qu'elle n'avait rien d'un missionnaire.

Y en a qui font l'amour par ennui
Y en a qui en font une profession
Bouche de Rose ni l'un ni l'autre
Elle le faisait par passion

Mais la passion souvent conduit
A satisfaire ses propres envies
Sans chercher si le bien-aimé
A le cœur libre ou est marié

Il fallut que cela un jour advienne
Bouche de Rose s'attira
La colère funeste des chiennes
Auxquelles elle avait piqué leur plat.

Mais les commères du village
Ne brillaient pas par l'initiative
Leurs répliques à cet outrage
Se limitèrent à l'invective.

On sait que les gens donnent de bon conseil
Discourant comme Jésus au Temple,
On sait que les gens donnent de bon conseil
Quand ils ne peuvent donner le mauvais exemple.

Ainsi une vieille jamais mariée
Sans enfant et sans désir,
S'efforça avec plaisir,
De donner à toutes le conseil approprié.

S'adressant à ces cornues, elle dit
Sur un ton sans réplique :
« Le vol d'amour doit être puni
par les autorités publiques ».

Elles s'en allèrent trouver le commandant
Et lui dirent sans barguigner :
« Cette salope a déjà plus de clients
Que tout un supermarché »

On envoya quatre gendarmes
Avec leur plumet, avec leur plumet,
On envoya quatre gendarmes
Avec leur plumet et leurs armes.

Le cœur tendre n'est pas du métier
Que pratiquent les carabiniers
Mais cette fois au train
Ils l'emmenèrent sans trop d'entrain

Cette nouvelle originale
N'eut besoin d'aucun journal.
Comme une flèche décochée,
Partout, elle s'est envolée.

A la gare, tous étaient là
Du commandant au sacristain
A la gare, tous étaient là
Les yeux rouges, le chapeau à la main.

Pour saluer celle qui
sans aucune prétention,
Pour saluer celle qui
importa l'amour dans le canton.

Sur le quai, on voyait une pancarte jaune
Avec un écrit au mitant
Qui disait : « Adieu Bouche de Rose
Avec toi, s'en va le printemps ».

Et à l'arrêt suivant, dans la gare
L'attendaient plus de gens qu'à son départ
Celui-ci jetait un baiser, celui-là une fleur
Ce dernier la réservait pour deux heures.

Jusqu'au curé, qui ne déteste pas
entre un miserere et un Ave-maria
la beauté sans concession,
Qui la voulut dans sa procession.

On promena l'un menant l'autre, dans tout le pays,
Les deux amours : le sacré et le mécréant.
Bouche de Rose en surplis
Et la Vierge au premier rang.



Fabrizio De André - Bocca di Rosa - 1967.
Version française : Marco Valdo M.I.




Partager cet article
Repost0
21 mai 2008 3 21 /05 /mai /2008 22:19

Il a déjà été question ici de Fabrizio De Andrè, ce chanteur italien, qui mourut relativement jeune – en 1999, après avoir mené une longue carrière de poète chanteur – de la fin des années 50 à la fin des années 90. Il a écrit, composé et chanté de très nombreuses chansons, dont la plupart sont ignorées dans l'aire culturelle française. Pourquoi ? Allez savoir.

On peut – sans hésitation – faire le rapprochement avec Georges Brassens, d'autant qu'il l'a traduit et chanté en italien. Et comme Georges, il a, qui l'entoure et l'éclaire, une aura qui perce les nuages du temps et captive l'attention de ceux qui ont la chance ou la curiosité ou le tout en même temps de le rencontrer.

Ceci, bien évidemment, peut être dit à propos de nombre d'artistes.

Mais De Andrè , de ce qu'en j'en augure et de ce que j'en sais, a quelque chose de plus, il exerce – comme Brassens – un magistère particulier.

Que De Andrè ait désigné Ugo Dessy comme son maître à penser, comme son père spirituel était pour moi aussi une solide recommandation, une stupéfiante indication.

Ce sont de jeunes filles, de jeunes femmes italiennes, des Sardes de passage, qui ont insisté pour que je le connaisse, qui me l'ont fait connaître. J'étais bien ignorant, je le suis toujours.

D'autres depuis m'en ont dit mille choses, toutes plus belles. Me sachant traducteur de l'italien vers le français (et non l'inverse), on m'a dit que je devrais m'essayer à traduire de ses chansons.

J'ai pioché un peu au hasard, entre d'autres travaux, l'une ou l'autre chanson de Fabrizio De Andrè. Le choix en est aléatoire, mais il fallait bien commencer quelque part. J'irai chemin faisant découvrir le reste.

Cette première canzone chante la guerre sous l'habit d'une ronde. Comme la ronde autour du monde de Paul Fort, elle se veut comptine, comptine enfantine pour prévenir les enfants, évidemment, du monde qui les attend.

Elle a des sœurs chez d'autres antimilitaristes notoires : Le Marchand de canons de Boris Vian, dont tous les bons clients sont morts en chantant et qui seul dans la ville s'en va danser la carmagnole, y a plus personne sur le pavé, au survivant solitaire de Jacques Brel : on est mille contre mille à se croire les plus forts, mais à l'heure imbécile, cela fait deux mille morts. On se retrouve seul.

Reste à savoir comment faire connaître un poète dans une autre langue que la sienne ? Une solution et une seule existe : traduire. Mais pas n'importe comment, pas sans de précautionneuses précautions. Qu'on écoute bien le texte, car le texte est – en soi – de la musique. Il y faut donc du rythme, de la scansion, des sons, du son, des pas, des colorations; bref, une musicalité. Il y faut aussi de beaux mots parfois tranchants comme la bise qui court le long du chemin de halage, parfois hésitants comme une brume entre des saules. On y pourvoira comme on pourra.

Ici, on ne trouvera ici que les versions françaises pour la raison que ce sont celles que j'ai faites et que pour les textes de Fabrizio De Andrè, dans leur langue d'origine – italienne ou ligure – on les trouvera aisément chez les amis d'Italie. Les chercher amènera à découvrir l'œuvre immense sans l'écran du traducteur Marco Valdo M.I., qui, ainsi que l'indique son petit appendice, est définitivement un manœuvre intellectuel.

Il ne convient pas de chanter plus haut que son col.

 

La ronde

Si la guerre survenait, Marcondiro'ndero

Si survenait la guerre, Marcondiro'nda

 

Sur mer et sur terre, Marcondiro'ndera

Sur mer et sur terre, qui s'en sauverait ?

 

Nous sauvera le soldat qui ne la voudra pas

Nous sauvera le soldat qui la refusera

 

La guerre a déjà éclaté, Marcondiro'ndero

La guerre a déjà éclaté, qui nous aidera ?

 

Le bon Dieu nous aidera, Marcondiro'ndera

Le bon Dieu nous aidera, le bon Dieu nous sauvera.

 

Le bon Dieu a déjà fui, on ne sait où

Le bon dieu Dieu s'en est allé, qui sait quand il reviendra

 

L'aéroplane vole, Marcondiro'ndera

L'aéroplane vole, Marcondiro'nderà.

 

Il jettera la bombe, Marcondiro'ndero

Il jettera la bombe, qui nous sauvera ?

 

L'aviateur qui ne le fera pas

L'aviateur qui ne la jettera pas

 

La bombe est déjà tombée, Marcondiro'ndero

La bombe est déjà tombée, qui se la prendra ?

 

On la prendra tous, Marcondiro'ndera

Beaux ou laids, Marcondiro'ndà

 

Grands ou tout petits, elle les détruira

Malins ou crétins, elles les foudroiera

 

Il y a trop de trous, Marcondiro'ndera

Il y a trop de trous, qui les remplira ?

 

Nous ne pourrons plus jouer à Marcondiro'ndera

Nous ne pourrons plus jouer à Marcondiro'ndà

 

Et vous pour vous divertir, allez plus loin

Allez vous divertir où la guerre n'ira pas.

 

La guerre est partout, Marcondiro'ndera

Toute la terre est en deuil, qui la consolera ?

 

Les hommes, les bêtes, les fleurs,

Les bois et les saisons aux mille couleurs.

 

Des gens, des bêtes, des fleurs, il n'y en a plus

De vivants, il ne reste que nous et rien de plus.

 

La terre est toute à nous, Marcondiro'ndera

Nous en ferons un grand carrousel, Marcondiro'ndà

 

Nous avons toute la terre, Marcondiro'ndera

Nous jouerons à la guerre, Marcondiro'ndà

 



Fabrizio De Andrè – Girotondo

Version française : Marco Valdo M.I.

Partager cet article
Repost0