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25 juin 2008 3 25 /06 /juin /2008 23:08

Ah, te voilà, toi, dit Lucien, l'âne aux pieds agiles et aux oreilles de démon, que deviens-tu ?


Mon bon Lucien, dit Marco Valdo M.I., je suis épuisé. J'ai tant passé de temps devant l'écran que j'en ai les yeux qui brûlent.


Arrête-toi, alors, fit l'âne avec pertinence. Quitte ton écran, va au jardin, bois un verre, pense à autre chose ou alors, causons tous les deux.


Mais enfin, Lucien, tu sais bien que pour causer avec toi, j'ai besoin de mon écran ou à tout le moins, d'une feuille de papier et de quoi écrire. Nous parlons par écrit, mon bon ami.


On parle par écrit, dit l'âne en ouvrant des yeux ronds comme des cibles. Voilà qui est singulier.


Pas du tout, ils parlent tous par écrit maintenant. Ce n'est pas pour autant qu'ils parlent comme des livres. Mais enfin, on parle avec les mains ou avec les doigts et ne va pas imaginer des choses... Nous, les humains, enfin certains, on ne pense pas qu'à ça.


Tout ça, c'est bien beau, mais que me proposes-tu ce soir ? Une petite chanson, je vois que tu es vraiment fatigué.


Bon, va pour une chanson, dit Marco Valdo M.I. C'est une bonne idée. Tu sais que je me suis lancé dans une exploration de la chanson italienne et bien, tu connais Goa, Marco Polo, Amundsen et son ami Scott, ou alors, le célèbre Livingstone, I Presume...


Oui, oui, dit l'âne un peu impatienté par ces préliminaires, ce sont tous des explorateurs. Mais où veux-tu en venir avec ces circonvolutions tarzanesques ?


Simplement à ceci, qu'ils ont découvert des mondes jusqu'alors inconnus d'eux et de leurs compatriotes – bien évidemment, pas des indigènes du pays (je sais, je sais,c'est tautologique mais c'est voulu). C'est l'évidence-même que les habitants de ces contrées « découvertes » les connaissaient déjà et depuis longtemps. Donc, la découverte est le fait de celui qui ne connais pas.


Oui, je comprends, dit l'âne en se grattant le bas-ventre d'un sabot énergique. Ce sont les taons, ils piquent, c'est très irritant. Enfin, je veux dire que je comprends bien où tu veux en venir.


Avant d'aller plus loin, une petite anecdote, si tu le veux bien. Je vois que tu acquiesces. Lorsque Christophe Colomb arrive devant l'île au bout de la mer Océane, les Indiens (qui n'en étaient pas, c'étaient plus que probablement des Caraïbes) s'encourant de la plage pour se mettre à couvert criaient : « Nous sommes découverts, nous sommes découverts ! ». Eux le savaient, vois-tu.


Tu te moques d'un âne et ce n'est pas bien. Maintenant dis-moi quoi avec ton exploration, conclut (provisoirement) l'âne exaspéré, mais content.


L'essentiel que je voulais te dire, c'est que depuis que je m'occupe de traduire des chansons italiennes, je vais de découverte en découverte, de surprise en surprise et pour tout dire, d'enchantement en enchantement. Il y a là un monde que je ne soupçonnais pas, dont je n'avais même jamais entendu parler et qui, pour moi, dans l'univers culturel où je vis, est une véritable révolution-révélation. Chapeau aux cantautori de la péninsule. Je vais juste te donner un exemple aujourd'hui, mais crois-moi, on y reviendra.

C'est une chanson sur le Roi Frédéric Ier de Prusse qui fut un grand roi militariste. Il créa la Prusse moderne et fit de l'armée prussienne une des plus puissantes de son temps. En somme, il est à l'origine des grandes catastrophes du siècle dernier et des quelques dizaines de millions de morts qui s'en suivirent. Cette chanson est un joyau d'ironie et en tout cas, les Mercanti di Liquore sont des oiseaux persifleurs.

Parenthèse : tu avoueras qu'un nom pareil est déjà en soi tout un programme.

Originaires de Monza, les Mercanti di Liquore forment un trio depuis le milieu des années 90. Depuis quelques années, ils travaillent aussi avec Marco Paolini. Tout en revendiquant nettement un attachement à Fabrizio De Andrè, ils évoluent maintenant dans un univers musical très contemporain, qui se fonde sur leur formation classique tout en intégrant rock, folk... et la dimension théâtrale.


 



Le Roi Frédéric


Roi Frédéric (Requiescat in pace)

Il y avait un grand homme sur la terre
(Roi Frédéric)

appelé Roi Fréderic

(Roi Frédéric)

Qui allait à la guerre

(Roi Frédéric)

cherchant l'ennemi...

mais l'ennemi était parti acheter une glace

et il s'en foutait du grand homme soldat.



Ennemi, ennemi... Sors, je t'attends

Tu ne peux pas finir ton sorbet maintenant !

Sors, je t'attends avec mon épée et ma lance

Pour le moment, je ne peux pas, j'ai mal à la panse !

(Requiescat in Pace)


Ennemi... Ennemi ? Nous ne blaguons pas... Ennemi

Tu es occupé ? Il appelle encore ... Ennemi !

Il utilise son téléphone spécial.

C'est moi, je suis le président, je suis le ministre de la guerre, je suis l'omnipotent !

Je suis le Caudillo, je suis le lider maximo, je suis le président, et I'm the goverantor, the terminator !

Ennemi ! Beuh !

Ennemi... Un grand homme sans ennemi est un grand homme tout seul !

(Roi Frédéric)

Ennemi...

(Roi Frédéric)

Allo ? Tu es prêt, ennemi ?

Allons, on ne rigole pas... Ennemi, si tu es là, frappe un coup !

Après ne te planque pas ... Je déteste, je déteste les embusqués ! Rends-toi après !

Impossible... Je suis ici ! Avec mon chien et le chien du président...

Un grand homme sans ennemi est un grand homme seul... vrai Bobi ?

Ennemi ? Je reconduis le chien et quand je reviens, je veux que tu sois là...

Je t'en prie... Ma femme se fâche !

Ennemi... Je suis le Roi Frédéric !

Je suis ton ami... Mais tu dois être mon ennemi !

Ennemi s'il te plaît... Un grand homme sans ennemi est un grand homme tout seul !

Ennemi ?

Je te laisserai gagner.



canzone : Re Federico – Mercanti di Liquore – 2004 in Sputi

Version française : Le Roi Frédéric – Marco Valdo M.I. – 2008

 

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